J'ai fait de la publicité ces derniers jours, après Christelle, pour les projets départementaux et régionaux : excellent bac à sable pour projeteurs qui veulent refaire le monde ... et urgence électorale.
Quelque chose me dit que ça n'intéresse guère.
Ça se comprend.
Ce n'est pas une histoire d'Europe. Personne ne nous a demandé notre projet pour l'Europe, avant les élections. On nous a juste accusés dans les journaux, faussement mais tant pis, de ne pas "parler d'Europe". C'était le gimmick : il fallait dire le mot "Europe, Europe", inutile de sauter comme des cabris, juste dire "Europe" et pas un mot de plus - ni oui ni non, ni blanc ni noir, ni économique ni sociale, environnementale on pouvait mais inutile d'aller dans le détail.
Ce n'est pas vraiment une histoire de France. Tout le monde se dit que Nicolas Sarkozy est là, bien là, et pour longtemps. Qu'on le qualifie de pragmatique ou de sectateur du Dieu Argent, chacun constate qu'il n'écoute que lui-même, donc inutile de disserter.
Il ne s'agit pas de tout ça - il s'agit juste de refaire le monde.
Ceux qui n'ont pas vu le monde ancien s'écrouler le 11 septembre 2001 ont au moins vu Wall Street couler à l'automne 2008. Ceux qui croyaient à la supériorité des tanks américains et ceux qui croyaient à la toute-puissance des fonds de pension souffrent de la même crise de foi.
Et pourtant, la droite gagne les élections européennes, et les dogmes fantaisistes du monde des affaires (the business community) font plus que jamais loi.
Pourquoi ? Il n'y a rien en face ? Juste de foncer plus vite dans l'impasse ?
Que sont devenus ceux qui croyaient notre service public super-performant ? Ceux qui jugeaient notre Etat fort comme le roc ? Ceux qui se réjouissaient des charges les plus élevées du monde ? Ceux qui justifiaient l'envolée des impôts locaux ? Les voilà écrasés par une montagne de dette que plus personne ne peut espérer faire fondre, qu'on rebaptise au "plus c'est gros plus ça passe" façon vendeurs de crédits subprime, avec de grands mots de "priorités d'avenir", de "bonne dette" et de "grand emprunt", de quoi nous sauver des déficits antérieurs ...
Et dans toute ça, notre bonne vieille gauche étatiste socialo-communiste, dite "de gouvernement", celle qui ne reproche rien d'autre à la droite que d'être "dure", celle qui a construit avec la droite "le marché" et ses stock-options défiscalisées, la grande corruption internationale et la bombe climatique, notre bonne vieille gauche reste considérée comme la seule alternative crédible, reste plébiscitée dans nos villes, départements et régions.
C'est peu dire qu'il faut un projet.
Il faut une sortie de secours.
Spleen, Frédéric...
T'as bien raison cela dit.
Joliment écrit en plus.
Bon, alors il est où ce projet ?
Tout en faisant honneur au nom de mon blog, j'attends le 4 pour me prononcer
D'ailleurs, tu noteras que malgré les messages que j'ai envoyé, aucune contribution n'a été postée sur le Carré (sauf la mienne mais je n'y me mets pas dedans ... normalement je ne devais riens poster ou presque).
Je pense que les gens sont fatiguées et en attente.
@ Pierre et Claudio : en fait c'est deux fois la même question
Ayant très peu fait campagne pour les européennes faute de temps, je suis plus "remonté" après que les militants les plus fatigués par leurs efforts et les plus déçus du peu de résultat.
Mais ce qui m'énerve le plus, c'est la timidité, les appels au "pragmatisme" de centre-bidule, ou à accepter "l'ouverture", à mettre de côté le projet "démocrate" trop idéaliste pour un centrisme mieux tempéré, et j'en passe.
Si je me suis engagé en politique c'est pour essayer d'empêcher la catastrophe, c'est avec la conviction que notre source commune, démocrate, est la source d'avenir pour le pays et la planète.
Mais depuis 2002, on en est presque au même point - on ne sait pas "vendre" ce projet, convaincre, enthousiasmer - alors que la société, la planète, le gouvernement se dégradent de plus en plus vite.
Imaginez quelqu'un qui propose à deux buveurs, un très alcoolisé et un très gros consommateur de sucre à bulles, fatigués chacun de son intoxication, la boisson miracle. C'est la meilleure pour votre santé, elle a bon goût, vous vous sentirez tellement mieux. C'est de l'eau de source. Et les deux de concert, faisant une moue de dédain : ah bon ? de l'eau ? c'est nul, tout le monde connaît ça l'eau, c'est rien du tout, il y en avait déjà quand j'étais gamin. Pourquoi vous me dérangez avec ça ? (paragraphe édité à 12:40 - FrédéricLN)
Oui, un beau billet, qui à l'image de ce monde balance entre espérance et désespoir...
Tout à fait d'accord avec le com de FLN : je me désespère du retour en force du concept de "centre". Cela n'a jamais rien voulu dire pour moi. Alors que démocrate, surtout si l'on en revient au sens originel, cela veut vraiment dire quelque chose...
Hors positionnement politique, je crois qu'il faut de la vision et de la capacité d'anticipation tout simplement... C'est ce qui manque à tout le monde, sauf à Bayrou je crois.
Après, le problème, c'est de vendre "ce concept" à nos concitoyens. Et ça, c'est une toute autre histoire.
Excellent, Frédéric ! Surtout ton commentaire sur les boissons :-))
Comme tu as raison, Benoît aussi.
Le mot "centre" est honni par nos concitoyens et ne veut dire quelque chose que pour ceux qui s'y sentaient comme dans un cocon. Pour les autres, il est à éviter. Je n'aurais jamais rejoint un "centre", j'ai rejoint un courant démocrate...
Démocrate, c'est le mot, mais il faut lui donner d'urgence un corpus idéologique.
Quant au long terme, tu as également raison. Les journalistes ne voient que le court terme et le vendent à leurs lecteurs.