Philippe Bilger consacre au Centre un très beau billet sous le titre "François Bayrou : l'orgueil du Centre". Il y exprime un doute fondamental :
"le dialogue, mais dans quel but ? L'éthique républicaine, mais à quelles fins ? La forme de la démocratie, dont le centrisme avec ses vertus est si soucieux, peut être à vie incompatible avec le fond d'une politique. Le Centre sait donner des leçons mais on doute - même s'il s'est incarné parfois brillamment en des temps anciens dans des pratiques de gouvernement - qu'il ait les mains capables de brasser un réel qui risquerait de les salir."
Il me semble y avoir là un sophisme avoué (c'est bien qu'il le soit !) et une petite forme de myopie (désolé pour Philippe Bilger).
Le sophisme est à la fin :
"on doute - même s'il s'est incarné parfois brillamment en des temps anciens dans des pratiques de gouvernement - qu'il ait les mains capables de brasser un réel qui risquerait de les salir."
Eh bien, justement : qu'avons-nous connu comme bons gouvernements depuis 30 ou 40 ans ? La liste est (hélas) vite faite : Barre, le dernier Premier Ministre du Centre ; Rocard, social-démocrate qui voulait gouverner avec le centre (le "big bang") ; Chaban, gaulliste social qui voulait gouverner avec le centre (la "nouvelle société"). Si, expérience en main, on se pose la question de QUI a a été capable de brasser le réel, de pratiquer le gouvernement, avec quelque efficacité et quelque effet positif, on trouve le centre. Et pas la droite, ni la gauche. Alors, sur qui devrait s'exercer ce "doute" ?
La myopie est au début.
"le dialogue, mais dans quel but ? L'éthique républicaine, mais à quelles fins ? La forme de la démocratie, dont le centrisme avec ses vertus est si soucieux, peut être à vie incompatible avec le fond d'une politique.
Le Centre est souvent considéré, en effet, comme défendant des valeurs en politique - le dialogue, l'éthique, le respect de l'autre, le civisme, la responsabilité, l'attention au long terme, et toute cette sorte de choses.
Mais qu'est-ce qu'une politique doit être d'autre ? Si elle n'est pas guidée par des valeurs, elle n'est rien d'autre qu'une captation du pouvoir à des fins privées. Nos concurrents de droite ou de gauche, quel "fond de politique" proposent-ils donc ? Faute de valeurs, aucun, à mon humble avis.
Je mets bien sûr à part le Front National dont les valeurs, nationalistes, sont parfaitement claires : les Français d'abord. Et le FN en déduit facilement un programme d'action.
De même des écologistes, malgré leurs éternelles bisbilles. Leur perspective… écologique est claire pour tout le monde. Et on a idée de la façon dont elle s'appliquerait.
À l'UMP ou au PS, qu'y-a-t-il ? Des "grands fauves" de la politique, des gens qui savent inspirer le respect ou la peur, et donner l'impression qu'ils seraient à l'aise au gouvernail. Des gens capables de faire des promesses le jour de l'élection, de les tenir (par exemple, le ministère de l'Identité Nationale et le paquet fiscal), de proclamer bien fort qu'ils les ont tenues et qu'ils sont quittes, et bien sûr de les défaire, puisque ces sottises n'avaient pour signification… que de leur permettre de proclamer bien fort "promesses tenues".
Tant que la majorité des Français confiera les clés aux irresponsables de ces deux partis, ça continuera à vau l'eau, comme depuis 1981.
Seule une politique fondée sur des valeurs comme le dialogue, l'éthique, le respect de l'autre, le civisme, la responsabilité, l'attention au long terme… peut sortir notre pays de sa crise et le relancer dans le XXIème siècle.
Puisqu'il est question de sophisme, il me semble qu'il y en a un beau dans l'affirmation suivante : "qu'avons-nous connu comme bons gouvernements depuis 30 ou 40 ans ? La liste est (hélas) vite faite : Barre, le dernier Premier Ministre du Centre ; Rocard, social-démocrate qui voulait gouverner avec le centre ..."
Pourquoi un sophisme ? Parce qu'avant de répondre à la question, il conviendrait de définir avec précision ce qu'on entend par "bon gouvernement". Or, cette notion renvoie précisément aux valeurs politiques de celui qui parle. Il y aura donc (à peu près) autant de réponses que de locuteurs. L'un trouvera "bon" le gouvernement Mauroy qui a aboli la peine de mort et nationalisé les banques, l'autre trouvera "bon" le gouvernement Balladur qui a reprivatisé ces mêmes banques, un troisième trouvera "bon" le gouvernement Fillon qui a eu l'audace d'allonger la durée de cotisation des retraites et d'instaurer le bouclier fiscal. Il en est même qui trouveront "bons" des formes de gouvernement plus hasardeuses, comme l'Etat français de Pétain ou la monarchie absolue type Louis XIV. Chacun jugera selon ses propres critères. Y compris l'auteur de ce blog qui - quelle surprise - trouvera bons surtout les gouvernements d'inspiration centriste. C'est ce qu'on appelle une forme de tautologie.
Yep, un sophiiste.
Sinon, faudrait arréter avec l'éthique mise à toutes les limonades...
Et le négationnisme de crimes financiers, c'est une petite forme de myopie, sans doute? Vous savez de quoi je veux parler, n'est-ce pas? En tout cas, vous disiez ne pas connaître la signification de SVT. Avec mon dernier billet, même les mauvaises excuses, vous ne les avez plus.
@ Ch. Romain : vous avez rectifié de vous-même : juger un gouvernement "bon" est affaire d'appréciation personnelle. J'ai la mienne, Philippe Bilger a la sienne, qui semble aller dans le même sens, et vous aussi : laquelle, d'ailleurs ?
@ Martine : vous avez raison. J'ai souvent entendu exprimer le même souci que vous, dans des milieux-proches-du-grand-patronat comme chez des politiciens de gauche. La voix de la raison économico-politique est toujours la meilleure, quand c'est celle du plus fort. Ai-je bien compris ?
@ °C : ouh là, que j'ai peur.
Vous laisse libre de vos interprétations...Très à la mode actuelle: deux camps dressés l'un contre l'autre, quand je n'ai jamais fonctionné ainsi.
Je n'aime pas les sophistes...
"Seule une politique fondée sur des valeurs comme le dialogue, l'éthique, le respect de l'autre, le civisme, la responsabilité, l'attention au long terme… peut sortir notre pays de sa crise et le relancer dans le XXIème siècle."
Il n'y a pas d'autre chemin possible !
L'éthique n'est ni de gauche ni de droite évidemment. Le respect est parfaitement neutre. Et la responsabilité n'est pas une étiquette que l'on achète n'importe où...
Le vrai centre est indépendant. Car il prône l'honnêteté intellectuelle et rien d'autre. C'est à dire qu'il est capable de proposer des solutions profitables aussi et surtout à ceux... qui ne pensent pas du tout comme lui. Et qu'il est prêt à dénoncer les pratiques non conformes à la démocratie dans son propre camp s'il le faut.
Ce n'est pas de l'inconscience, c'est du bon sens.
N'importe Nawak, le terme "éthique" a été siii vilipendé brandi tel un étendard qu'il ne signifie plus rien, surtout dans le milieu entreprise et commerce et le reste aussi par voies de conséquences.
Voici les VRAIES Valeurs, de LA France Chevaleresque de l'Honneur de Bertrand du Guesclin (1320-1380), et Celle de la Sagesse de Michel Eyquem de Montaigne (1533-1592), à transmettre à TOUS nos enfants : http://purete-parfaite.pagesperso-o...
car AUCUNE homasse politique actuelle, n'est capable d'en être l'EXEMPLE ! Or la MEILLEURE politique, comme la MEILLEURE éducation, est celle de L'EXEMPLE C.Q.F.D.
Avec les respects d'un Homme d'Honneur FORZA ! (EN AVANT ! en corse).