Plan d'austérité draconien en Irlande : le Point.fr parle de "15 milliards" dans ce pays de 4,5 millions d'habitants, ce qui à l'échelle française représenterait 225 milliards d'économies et de taxes - l'équivalent de la totalité des recettes de l'Etat. Mais :

"Le gouvernement ne compte pas, en revanche, toucher à l'impôt sur les sociétés, fixé à 12,5 %, l'un des plus bas d'Europe, qu'il juge nécessaire à la future croissance économique."

Taux minime, que l'Europe peut juger responsable d'un dumping qui a construit la croissance irlandaise des dernières années par parasitisme aux dépens du reste de l'Europe. Alimentant une spéculation déconnectée du potentiel économique réel, une accumulation de valeur fictive par le jeu des prix de transfert, une irresponsabilité économique qui exposait particulièrement l'Irlande au risque de crash.

Oui, continuons comme ça !


Mettons les points sur les i : ni l'intégration européenne, ni le pacte de stabilité, ni l'euro, ni Bruxelles ne sont responsables des faillites irlandaise et grecque[1].

Le responsable est l'absence de centre de décision européen en matière économique et monétaire. Dans une économie continentale fortement intégrée par nature - les personnes, les biens, les capitaux voyagent d'un voisin à l'autre - chaque Etat se fait sa petite sauce règlementaire dont le premier objectif semble être de gratter la croissance du voisin.

Bien sûr les tissus économiques, les cultures, le rôle du secteur public… varient d'un pays à l'autre.

Mais ce dont il s'agit ici, c'est précisément de ce qui a le même sens d'un pays à l'autre : les bénéfices, en euros, réalisés en fin d'année par les sociétés et plus précisément les grandes sociétés. Y a-t-il le moindre bon sens à ce qu'ils soient taxés ici à 12%, là à 25% ou 33% ?

Et comme ces bénéfices sont facilement mobiles, les Etats sont poussés à réduire sans cesse ces taux - c'est-à-dire à concentrer l'impôt sur les ménages ou sur l'emploi.

L'harmonisation de l'impôt sur les bénéfices est une très vieille affaire (nous en parlions déjà, je crois, lors de la campagne des européennes 1999… je n'étais pas encore dans ce parti[2]). Une très vieille affaire qui progresse très lentement. Espérons que le délire irlandais réveille les Européens et remette l'harmonisation dans le sens de la marche.


Et bien sûr, pour que l'harmonisation soit efficace, il faut dissuader les échanges financiers avec les paradis fiscaux, et pour cela, créer une "brigade fiscale européenne" pour contrôler les prix de transfert des multinationales (si ça n'existe pas déjà ?). Tout ça pourrait être fait dans le même mouvement, si demain il n'y avait plus en Europe gesticulation, mais mouvement.

Notes

[1] Tiens, cette fois-ci, les complotistes ont oublié d'accuser l'OMC !

[2] Cf. ce billet, et pour la campagne des européennes 2009 celui-ci.