J'ai été désolé par les résultats des élections générales britanniques. La déroute de nos amis, le centre libéral-démocrate, malgré un bilan gouvernemental exceptionnel, rappelle l'adage attribué à Bismarck : "dans un système à trois puissances, il faut être l'une des deux".

(Quelques tweets et liens de lendemains d'élection : 1, 2, 3, 4, 5…)

L'électorat de gauche s'est effondré depuis l'élection de 2010, alors que, quand les LibDems avaient accepté après cette élection une coalition avec les Tories, environ la moitié de leur électorat avait rejoint, selon les sondages, le Labour. Disparus.

La quasi-sécession électorale écossaise, et la forte progression du parti de droite souverainiste UKIP (12%), n'ont pas empêché les Tories de progresser, largement en sièges, mais aussi en nombre de voix, par rapport à 2010.

Alors regardons les signes d'espoir :-) dans cette brillante réélection de David Cameron !

Ce succès correspond sans doute aux résultats spectaculaires obtenus par le gouvernement de coalition depuis 2010, au-delà du slogan initial de "Big Society" :

  • le chômage est tombé à moins de 5% (et ce n'est pas, contrairement aux années Blair, parce que des gens se seraient fait reconnaître invalides du travail ; et, contrairement à la France, il y a un flux d'immigration continu) ;
  • le déficit budgétaire, toujours élevé, a été tout de même divisé par deux ;
  • la croissance économique est de 3% par an.

Ceci avec une forme "d'austérité" budgétaire (550000 emplois publics supprimés), à l'inverse de ce que vit la France, toujours en pleine "relance keynésienne" : la dépense publique n'a jamais été aussi forte chez nous, aujourd'hui 57,2% de la production nationale !

Mais, contrairement à ce qu'on imaginerait sans doute pour le cas français, les dépenses coupées au Royaume-Uni n'ont pas été en priorité les dépenses sociales, mais au contraire, les dépenses traditionnellement privilégiées par la droite : l'armée a été la première touchée ; les aides aux entreprises ont quasiment disparu ; la police a été touchée également ; les investissements publics dans les transports ont fortement baissé ; ainsi — point commun avec les annonces du gouvernement Valls — que les dotations aux collectivités locales.

Je nuancerais de deux façons :

  • d'une part, le 2ème mandat Cameron, sans coalition, risque d'être marqué par une forte réduction des dépenses sociales (et on verra bien le résultat : j'imagine que les Britanniques pourraient regretter le temps de la coalition !) ;
  • d'autre part, les solutions britanniques ne sont certainement pas transposables telles quelles à la France. Par exemple, nous ne pouvons "dévaluer" notre monnaie qu'avec l'accord de nos partenaires donc de la BCE (comme cela a lieu de façon spectaculaire depuis janvier dernier), alors que le Royaume-Uni gère la livre seul. Autre point, le nombre de fonctionnaires statutaires en France (emploi garanti) est très élevé, par conséquent, nous ferons plus d'économies en internalisant ce qui était auparavant confié au privé (à emploi public constant) plutôt qu'en externalisant comme l'a fait le gouvernement britannique.

L'expérience du mandat Cameron prouve cependant que :

1) contrairement à ce que croient tous les gouvernants français depuis 1991-92, il est possible de faire et changer énormément de choses, y compris en un seul mandat, et de remettre un pays dans la course ;

2) contrairement à ce que croient tous les gouvernants français depuis 1991-92, il est possible de couper les financements de vos alliés et électeurs traditionnels (et non pas de ceux de l'autre camp) ;

3) on peut être réélu triomphalement avec cette méthode, si elle marche.