La ruine des banques n'est pas une ruine physique : il n'y a eu ni guerre, ni tremblement de terre. Il ne devrait pas y avoir destruction de valeur réelle. En fait, c'est la ruine des banques elle-même qui, en tarissant le fameux "robinet du crédit", assèche la capacité de production des entreprises.
La ruine des banques vient d'un pillage par une caste. L'argent qui a quitté leurs caisses est parti quelque part.
Le slogan "rendez l'argent !" est donc tout à fait fondé.
Des principes positifs et durables, des principes de justice et de responsabilité, devraient permettre de légiférer pour récupérer rétroactivement les "bonus" et autres dividendes qui ont été fondés sur des bilans biaisés, sur des estimations fausses de la valeur créée[1].
Sans qu'il y ait besoin d'évoquer une responsabilité pénale de certaines personnes, à la manière de Nicolas Sarkozy qui prétend trouver et punir des responsables. Car si les estimations de la valeur (des actifs, etc.) étaient biaisées, c'était surtout par ce fameux effet pyramidal ("de Ponzi") qui par définition, n'a pas un responsable unique : c'est "le marché" qui a collectivement convenu que des entreprises rapportant 1 par an pouvaient valoir 100 - et c'était vrai tant que "le marché" voulait bien y croire. C'est "le marché" qui doit maintenant refaire ses calculs.
Notes
[1] L'alternative serait une taxation mondiale, et ponctuelle, des fortunes privées. Certes, cela remettrait dans le système financier une liquidité fondée non sur de la dette, mais sur des actifs existants. Mais il serait, à mon sens, scandaleux de "taxer pour taxer", de spolier une richesse constituée par un travail réel, une création réelle de valeur. Seule une situation d'extrême urgence collective, une menace contre la survie de la société, le justifierait.
Ton article vient est très approprié pour dénoncer la distribution de bonus de 8 Millions d'Euros chez DEXIA qui a été sauvé avec l'argent du contribuable.
Concernant les Bonus des Traders, j'avais parlé dans un article en janvier de "crime économique"
http://sophiamodem.hautetfort.com/a...
OBAMA a bien fait voté une loi : 90 % de taxe sur les bonus pour les firmes qui ont bénéficié des aides de l'Etat
http://news.bbc.co.uk/1/hi/business...
Alors pourquoi ne pas faire passer en France un décret en urgence pour arrêter ces abus du pouvoir financier ?!?!?
Une simple question que je me pose depuis pas mal de temps: lorsqu'il y a perte d'argent, un argent bien réel qui a été investi sur des Marchés qui sont ensuite en chute libre, y a t-il perte partielle ou totale et définitive de cet argent, ou des gens - tels que des vendeurs à découvert - les récupèrent-ils? Question de béotien, mais interrogation qui me semble moralement importante.
@ JF : Voilà une question bien formulée, je crois ; en attendant une réponse plus précise de spécialiste, je dirais que "l'argent" n'est effectivement "réel" que le temps d'une transaction (achat / vente / versement de salaires, dividendes, bonus). Ensuite on détient un actif qui est certes estimé à une valeur, mais celle-ci fluctue, comme la valeur d'une maison. L'estimation que vous pouvez en faire repose sur celle qu'en ferait "le marché" sur lequel vous pouvez le revendre ("liquider") : cette valeur est donc "spéculative".
Donc, j'avais un PERP estimé l'an dernier à 4000 euros et cette année à 2500 euros : personne n'a récupéré les 1500 euros ; que je n'ai d'ailleurs jamais eu (4000 était juste une estimation).
Autre exemple, si votre actif est un compte en banque crédité de 10000 euros, même cette valeur est spéculative : votre estimation de 10000 repose sur la confiance que vous avez dans le fait que l'Etat garantira la somme si la banque fait faillite. C'est spéculatif, mais beaucoup plus sûr qu'un PERP ou une maison (sauf hyperinflation).
La façon dont je comprends la crise financière, c'est que les managements et actionnaires des banques ont, collectivement et conjointement avec les agences de notation, grossièrement surestimé la valeurs des actifs détenus (notamment actifs pourris, opaques et fortement spéculatifs), et ont ainsi justifié le fait d'en prélever une bonne partie pour eux (bonus et dividendes) - transactions "en bon argent", qui leur ont permis d'acheter pour eux des actifs plus sûrs et n'ont laissé dans les caisses des banques que les actifs pourris, opaques et fortement spéculatifs.
Un pillage en règle, mais masqué, quelques années durant, par des "valeurs de marché" sans rapport avec les réalités. Avec les "sous-jacents" ...
Salut,
Je ne vois pas bien où serait le scandale d'une taxation des fortunes privées. Ce n'est pas "spolier une richesse constituée par un travail réel" qui est choquant : à ce compte là, l'impôt sur le revenu est un scandale. On peut refuser une double taxation du revenu (flux) puis de la richesse (stock), mais la plupart des fortunes mondiales s'accroissent par des revenus grandement défiscalisés, et il ne serait pas du tout illégitime de les taxer de quelques dixièmes de % chaque année... Surtout que l'utilité marginale des sommes redistribuées à des usages plus productifs serait facilement supérieure...
@ edgar : merci pour le commentaire ; je suis bien entendu favorable à l'imposition sur le revenu comme sur le patrimoine, comme cela existe dans tous les pays du monde à ma connaissance.
Le point de ma note de bas de page est que taxer au même pourcentage toutes les fortunes, dans une logique d'imposition classique (ce que j'appelais, terme sans doute mal choisi, "taxer pour taxer") ne résolvait pas le problème de l'accumulation, par certains, d'une richesse sans cause, assise simplement sur des bilans fallacieux. De mon point de vue, il serait préférable de rechercher la liquidité chez ceux qui en ont bénéficé indûment, plutôt que chez tous les détenteurs d'actifs indistinctement.
Oui. Mais plein de problèmes pour ta suggestion (un peu de populisme au Modem comme disait Colombani hier ?
D'une part, il faudrait macroéconomiquement savoir ce qu'est la valeur... Comme les bilans des banques sont de plus en plus calculés à partir de valeurs de marché, ce sont des valeurs fixées par l'opinion, fort variable, qui donnent la taille d'un bilan. A quand s'arrêter pour apprécier la "juste valeur" d'une banque ?
Ensuite, au sein d'une banque particulière, certains secteurs ou services peuvent être bénéficiaires et réclamer "légitimement" des bonus alors même que gloablement leur banque aura perdu de l'argent.
Pour reprendre un grand classique, il ne suffit pas de dire que des têtes vont tomber, il faut savoir dire lesquelles, et pourquoi...
@ edgar : "il faudrait macroéconomiquement savoir ce qu'est la valeur...", oui mais justement, si on paye des bonus et qu'on verse des dividendes, c'est à partir d'une mesure de la valeur (qui en l'occurrence a été violemment faussée, ces dernières années, dans le monde de la finance). La question n'est pas de savoir s'il "faudrait" savoir ce qu'est la valeur, mais de quelles façons (au pluriel) on la mesure, l'estime, l'apprécie.
J'ai un billet en éternelle préparation là-dessus, il finira bien par sortir
Je suis évidemment d'accord sur le fait que certains salariés peuvent mériter des primes dans des entreprises par ailleurs déficitaires ; la question reste cependant posée de savoir si ces entreprises ont les moyens financiers de payer ces primes. En gros, si elles ne devraient pas avoir été mises dans un régime de type "redressement judiciaire", ou liquidation / nationalisation, qui reste à définir par la loi puisque, nous explique-t-on, ni la liquidation ni le "chapitre 11" ne sont bien adaptés à de grandes banques "avec un rôle systémique." Là-dessus j'avais fait un billet fin septembre dernier : http://demsf.free.fr/index.php?post...
P.-S. : je n'ai pas l'intention de m'en prendre aux têtes de qui que ce soit, mais aux comptes ; j'ai essayé dans mon billet de dire assez clairement lesquels peuvent avoir besoin d'être réestimés, et pourquoi !