Art Goldhammer l'a constaté pendant son séjour en France : les sympathisants de gauche semblent avoir déjà renoncé à gouverner en 2017-2022.

J'ai souvent critiqué la prétendue "prospective politique" basée sur… les sondages d'opinion les plus versatiles. Mais cette fois, il me semble que les sondages décrivent une véritable cristallisation de l'opinion publique.

La victoire de M. Sarkozy à la présidence de l'UMP est quasi-certaine ; sans quoi, d'autres leaders ayant des réseaux solides se seraient lancés, que ce soit MM. Fillon, Juppé, Copé ou Bertrand.

La victoire de M. Sarkozy à une primaire est, de très loin, le résultat le plus probable. N'a-t-il pas obtenu près de 49% du suffrage des Français en 2012 ? Cela augure mal d'une "impopularité" parmi les électeurs de droite, particulièrement, les 1 ou 8% de militants qui iraient voter à une primaire. Les petites manoeuvres sur l'inclusion ou non du centre dans la primaire, sont sans portée : les électeurs du centre sont indépendants d'esprit, beaucoup attendent jusqu'à la véritable élection pour se prononcer, ils ne seront qu'une minorité à se déplacer pour des primaires.

De plus, beaucoup de sympathisants du FN pourraient aller voter M. Sarkozy contre M. Juppé : une occasion comme une autre de soutenir un politicien moins "politiquement correct" que les autres.

Quant aux affaires aux basques de M. Sarkozy : après 2 ans et demi de lenteurs judiciaires, comment cela pourrait-il se dénouer (instructions, procès, appels, Cassation…) dans les 6 ou 12 prochains mois ? C'est tout à fait improbable. Et dans 12 mois, si la justice interférait dans une campagne nationale déjà bien lancée, cela serait jugé déplacé.

Il me semble que le succès quasi-certain du FN aux cantonales et surtout régionales de 2015 (moins de 30% m'étonneraient) offrirait à M. Sarkozy le levier dont il a besoin pour faire basculer en sa faveur la classe politique et médiatique : se présenter en seule alternative au FN. Quel que soit son propre programme. Et même, plus il force à droite, plus il joue la provoc, plus il obtiendra de sympathie des électeurs potentiels du FN, et plus sa prétention sera fondée.

La gauche classique semble paralysée, hypnotisée, sans ressort. Le centre n'a plus aujourd'hui de soutien populaire actif. La gauche de la gauche, les écologistes, les "frondeurs", malgré leur rancune contre M. Hollande, peuvent bien constater que pas grand monde ne bouge le petit doigt pour les secourir.

Une alternative crédible, gagnante, se constituera-t-elle d'ici 2017 ? Un mouvement démocratique, écologiste, progressiste, républicain, défenseur des libertés, peut-il susciter et fédérer assez de forces, de soutien, d'intérêt public, de leaders, d'élan, de cohésion… pour convaincre 30% ou plus des Français au premier tour de 2017, et plus de 50% au second tour ?

J'espère que cela arrivera, comme je l'ai espéré en vain en 2005-2007. Je crois que la société française en a le ressort, les capacités. Mais pour l'instant, je ne vois rien venir.