3000 commentaires à ce jour sur ce blog (depuis sa réouverture fin 2008), merci pour toutes ces contributions.
Il y a aussi les commentaires sur Facebook, l'un de ceux-ci, sur Nouvelle Donne, me donne l'occasion de préciser mon billet d'hier.
Selon ce commentateur (et ami !), "la crise résulte de la recherche effrénée des gains de productivité" ; je crois à peu près le contraire.
Pour moi, quand les acteurs économiques et les décideurs publics cherchaient à faire progresser la productivité (au sens large : efficience, rapidité, qualité, flexibilité, réponse aux attentes des clients, créativité…), l'économie se développait, la société progressait, des solutions pouvaient être apportées aux menaces sur l'environnement[1].
La crise résulte de la fin de cette dynamique de progrès économique, remplacée par une logique de captation / prédation par de nouvelles féodalités (bancaires, informationnelles, des matières premières, des réseaux politico-économico-médiatiques…) qui s'enrichissent dans une économie de casino, et dissuadent l'investissement productif.
Exemple pratique.
- Il y a 40 ans, les jeunes diplômés des Ponts et chaussées allaient faire des ponts et des chaussées, qui permettaient aux gens et aux marchandises de circuler.
- Il y a 25 ans (de mon temps ), les ponts et les chaussées étaient déjà construites, nous allions faire du conseil en organisation pour mettre nos entreprises et nos services publics au niveau mondial de performance ou de qualité.
- Depuis 10 ans, les jeunes diplômés vont dans les banques faire tourner des algorithmes qui font gagner de l'argent sur les "produits dérivés" presque sans lien avec l'économie réelle.
Donc d'accord avec mon ami et commentateur quand il s'inquiète d'une "oligarchie politique, économique et financière qui nous mène droit dans le mur". Mais, à mon avis, c'est sur le terrain de la performance, de l'efficacité, de la créativité, et de la productivité qu'il faut affronter et battre cette oligarchie.
Mais pas d'accord pour estimer que "ce n'est pas les 0,5 % de croissance qui vont réussir à réduire le chômage de masse..." et qu'il faut donc une nouvelle "réduction du temps de travail en passant à la semaine de 4 jours."
Ce discours sur la fatale stagnation de la France, dans une mondialisation qui nous échappe, je l'entends chez presque tous les gens avec qui je discute de politique. Il est désarmant de bon sens (vous pensez ! depuis quinze ans qu'on s'enfonce…) mais surtout désarmant au sens propre.
Il n'y a pas de fatalité de la stagnation, il n'y a pas d'obligation pour la France à rester bloquée tous les vendredis chez elle devant sa télé !
Avoir 4 ou 5% de croissance par an, c'est tout à fait possible et raisonnable : c'était le cas sous le gouvernement Rocard, et les contraintes étaient pourtant les mêmes qu'on invoque aujourd'hui (coût de l'énergie, chômage préexistant, montée en puissance des industries "émergentes" etc.). Et cela ferait progresser l'emploi d'environ 3% par an : environ 700 000 personnes au chômage retrouveraient chaque année un emploi !
Pour moi, la citoyenneté, l'écologie, l'épanouissement personnel,… ne peuvent remplacer la réussite collective de notre économie française ; ce sont plutôt les motivations et les ressorts qui nous feront construire une économie nouvelle.
3000 commentaires sur ce blog : un exemple de nouvelle croissance, qui n'aurait pas été possible il y a vingt ans ! Espérons que ce capital d'information, gratuit et accessible à tous, soit productif dans les années qui viennent
Notes
[1] Je dis bien pouvaient : c'est pas automatique !
les plus anciens ont connu des périodes de croissance, qui étaient aussi de rattrapage par rapport aux destructions de la guerre. Mais peut-on encore soutenir que la croissance de 5% est encore possible en France ? Les ressources naturelles ne sont pas illimitées, et ce qui frappe, notamment dans une période de Noël, c'est l'énorme gaspillage de ressources
http://unoeil.wordpress.com/2013/12...
Ne faut-il pas se poser des questions sur notre organisation, peut-être que Nouvelle donne a raison, et que l'on ne peut donner plus de 15 heures de travail à chacun, notamment parce que la production a lieu désormais ailleurs. Peut-être faut-il envisager un monde d'économies de ressources, où l'on essaiera enfin de réduire les temps de transport, où l'on passera plus de temps avec les autres, plutôt que de poursuivre des objectifs financiers qui nous font perdre l'essentiel. Il y a une différence de vision dans nouvelle donne, il y a aussi une autre philosophie de la vie.
Bonjour triton. La croissance annuelle a dépassé 5% en moyenne tout au long des années 60, qui n'étaient pas des années de reconstruction ; si l'on raisonne "par habitant" (ce qui donne une idée plus juste du développement du pays), la croissance a encore été de 4% en 1988-89, ou 3% de 1998 à 2000.
Je suis tout à fait d'accord avec vous pour penser qu'une croissance annuelle de la consommation de ressources naturelles, n'est pas soutenable. Mais ce n'est pas ce que mesure le taux de croissance. Celui-ci mesure la valeur de la production, aux prix que le consommateur paye pour celle-ci (ou, pour le service public, au prix que paye le contribuable).
Si la France allait vers un développement privilégiant l'emploi (rémunéré) par rapport à la consommation de ressources naturelles (la Terre n'est pas rémunérée), cela se traduirait par PLUS de croissance.
Le raisonnement des tenants de la décroissance me semble donc fondé sur une erreur élémentaire. Pourquoi perdure-t-elle ? Sans doute parce qu'elle rejoint une désillusion générale par rapport aux annonces de croissance future que font les politiques depuis plus de 30 ans. Hélas, depuis 1980 ou 1981, le ressort du développement français semble cassé (Cf. les chiffres ici http://www.institut-entreprise.fr/r... ). Les années 88-89 par exemple, sont-elles une exception presque aléatoire, ou la preuve que, bien gouvernée, la France repartirait de l'avant ? Je persiste à faire la seconde hypothèse !
100% d'accord avec toi. Bonne année au passage !
Merci edgar ! Venant de ton autorité sur le sujet, ça fait doublement plaisir.