La compétitivité, c'est faire que le monde entier nous envie. Pour ça, dans un monde tissé par l'informatique, il faut nous lancer à la conquête de ces nouveaux territoires au lieu de les considérer comme de la petite intendance, à peine un gagne-pain pour les grands ingénieurs ou banquiers que nous sommes. Ou des grands architectes de la société. Parce que notre talent pour la finance, les grands projets ou la modélisation sociale n'a d'avenir que s'il passe aux Barbares[1], passe dans ce nouveau monde.


Troisième territoire à conquérir après l'informatique financière et les systèmes d'information des grandes entreprise : le numérique au sens commun du terme ; c’est-à-dire l’ingénierie de la relation entre producteurs et consommateurs, entre les institutions et les gens.

Là encore, le leadership a été pris par d’autres, en premier lieu par les Etats-Unis avec Google.

Pour la France, il reste presque tout à faire, et pourtant nous aurions tous les atouts pour réussir.

Parce que nous avons une expertise enviée dans le monde entier, celle de l’art de vivre[2]. Celle de concevoir des places de village, des fêtes de la musique, des grands magasins, des plages, où les gens se sentent bien, où ils ont envie de revenir.

Comment ça, ce n’est pas de l’économie ? Mais depuis dix ans, c’est le seul moteur de notre croissance ! C’est cela aussi l’économie numérique, ou bien, ce sera cela aussi : transférer notre savoir-vivre dans des produits et services qui séduiront le monde entier.

Ce n’est pas de l’économie au sens où ça dépasse l’économie : c’est une révolution sociale.

Nous construisons là une nouvelle génération de services à la fois humains et informationnels, à la fois universels et enracinés dans le territoire :

  • comme l’autopartage, le covoiturage ou le vélo en location,
  • les économies d’électricité en réseau dans les foyers,
  • la production citoyenne d’information,
  • l’audioguidage en chinois ou autre langue dans les sites touristiques,
  • la notation des produits par les consommateurs,
  • le partage de vidéos dans l’enseignement,
  • le repérage automatisé de fraudes à la Séc’ Soc’,
  • le suivi des patients à domicile par la télémédecine,
  • une assistance sociale ou un Pôle Emploi qui ne passent pas tout leur temps à gérer des dossiers,
  • un cadastre entièrement numérique avec toutes ses applications pour la gestion du sol, de la fiscalité, les services de réseau…

Des révolutions comme celles-là[3] dans les services, il y en a des milliers. Elles commencent à exister, mais 99% du chemin reste à faire.

Et sans doute 99% des économies, sur les systèmes dont nous avons hérité, qui ont un quart de siècle de retard et qui plombent la compétitivité de la France.

Ce n'est pas l'affaire de l'État ? Au contraire, c'est l'affaire de chaque Ministère, de chaque agence de l'État, de chaque organisme social, de chaque commune. Faites la conquête de ce nouveau territoire, vous serez plus que compétitifs : vous serez leaders, vous serez uniques. Sur toute la planète, il n'y a qu'un Argenteuil[4].


Conquérir le territoire de l’informatique financière, celle qui gère et transfère l’argent, pour que cette informatique constitue et produise une information juste qui incitera à investir dans l’économie réelle.

Conquérir le territoire des systèmes d’information des entreprises, pour que celles-ci conçoivent les produits et les services les plus performants du monde.

Conquérir le territoire des services, rendre plus fluide et heureuse, grâce au numérique, la relation entre les gens et les institutions privées, comme publiques.

Voilà trois défis pour la compétitivité de la France, voilà ce que serait une politique de renaissance numérique.

Notes

[1] C'est à Georges Suffert, je crois, que je dois cette phrase de Frédéric Ozanam.

[2] Les Grecs sont forts aussi. Ça donne de l'espoir pour leur pays.

[3] Déclameur : ce qui me fait penser à celles-ci, ce sont des lectures sur les blogs, des expériences personnelles, et aussi le fait de travailler sur certains de ces projets.

[4] À deux autres près.