Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, déclare hier au sujet du "grand débat national" :
"On ne tergiversera pas sur les valeurs. L’IVG, la peine de mort, le mariage pour tous, ne seront pas sur la table."
Reformulons :
Le peuple peut débattre démocratiquement de la couleur de voiture qui lui convient à condition qu'elle soit noire.
Honte à cet appel aux "valeurs" pour interdire le débat sur des lois, l'expression d'opinions (même majoritaires) sur celles-ci.
"Toute Société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution." (Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, article 16).
Le ver était dans le fruit dès le départ, quand Emmanuel Macron a annoncé, le 10 décembre, un "débat national… sans précédent" en précisant :
"Je veux en assurer moi-même la coordination".
Ça n'est pas, en démocratie, le rôle de l'exécutif !
C'est une question de "garantie des droits" et de "séparation des pouvoirs".
Si un débat doit être organisé dans le cadre des institutions républicaines, ce doit être par des institutions indépendantes, comme… le Parlement, le CÉSE ou la Commission Nationale du Débat Public (CNDP).
Le cadre à l'intérieur duquel ces institutions travaillent, c'est la Constitution. Le débat démocratique ne peut pas, ne doit pas être subordonné à la formulation par le pouvoir exécutif de ses "valeurs".
C'est précisément ce que déclarait avant-hier la présidente de la CNDP, Chantal Jouanno :
"Il n’est pas dans mon pouvoir de censurer les sujets".
La déclaration de Benjamin Griveaux contredit précisément celle de Chantal Jouanno. C'est, de la part du gouvernement en la personne de son porte-parole, un excès de pouvoir.
Mme Jouanno s'est écrasée en renonçant à piloter le débat.
Il y a 5 ans, le CÉSE s'était lui aussi écrasé, et anticonstitutionnellement !, en refusant d'organiser un débat interne. Sur le même sujet, d'ailleurs, que celui qui a suscité ces déclarations contradictoires.
Et après, les mêmes proclamateurs de "valeurs" vont se scandaliser que les citoyens préfèrent débattre sur les rond-points, dans des médias "de réinformation", dans des partis "extrémistes" ou "populistes", etc. ????
Vous n'aurez pas ma liberté de parler.
dommage pour Jouanno elle avait pas trop mal pour ce job, mais bon à se payer 14.000 par mois (même si il n'y a pas que cela), ils cherchent les problèmes...
pour le débat, de mon côté, je n'en attends pas grand chose, la soi-disant nouvelle politique vantée par Macron est, de ce point de vue de la vie démocratique, strictement identique à l'ancienne (voir pire car manquant d'expérience ils ont tous peur...)
Sinon, quand un gars se réfugie derrière le mot "valeurs", on peut être sûr de deux choses : 1. il ne sait pas ce qu'il veut dire 2. il est au bout de ses arguments et surtout de ses idées
Malheureusement ça fait quelques années que ça dure (le refuge derrière le mot "valeur") et que cela bloque tout débat d'idée...
Je colle ici une discussion sur twitter (le billet en vient) :
(Objection) — L'opinion est à 50/50 depuis des années sur la peine de mort. Je comprends très bien qu'ils ne veuillent pas ouvrir la boîte de Pandore ... De quoi aurait l'air la France ?
(ma réponse) — Précisément, le mouvement des Gilets Jaunes ouvrait la boîte de Pandore, les questions fondamentales sur le rôle du politique, sur la communauté nationale, sur ce qui "vaut" de payer l'impôt. L'erreur de Pandore a été de refermer la boîte : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pando... …
— Je ne vois pas le rapport entre l'impôt, le rôle du politique et la peine de mort.
— La citation de la "peine de mort" par M. Griveaux dans cette déclaration est un chiffon rouge, c'est lui qui introduit ce sujet qui symbolise pour beaucoup de gens les valeurs qui seraient essentielles bien qu'opposées à une opinion majoritaire. Dire "sujet de la peine de mort", c'est dire, au moins à l'intelligentsia et aux médias "voulez-vous vraiment la démocratie ? ne préférez-vous pas que vos valeurs soient imposées au peuple contre son gré ?". Au-delà de cette provoc' de M. Griveaux, je crois que le mouvement des Gilets Jaunes, partant du sujet de l'impôt écologique, pose la question politique de fond, celle du contrat social, ce qui fait de nous une communauté décidant collectivement et y mettant de l'argent ensemble (voir aussi http://demsf.free.fr/index.php?post...). C'est précisément le cas de la révolution qui conduit dès 1789 à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen : 2 articles sur 17 (art. 13, art. 14) portent sur le caractère démocratique de l'impôt. C'est pourquoi le pouvoir actuel se fourvoyait, à mon avis, en espérant y répondre (le 10 décembre) par l'allonge d'argent. Cela a juste conduit le mouvement des Gilets Jaunes à expliciter qu'il demandait fondamentalement plus de démocratie (avec le "RIC"). Le point qui donnait un peu d'espoir était l'ouverture du débat national. Mais la formulation étrange retenue par le Président, suggérant un débat très contrôlé par l'exécutif (confirmée plus tard en disant qu'il en "définirait les attendus"), en condamnait les chances. Espoir ré-animé le 14 décembre quand le CÉSE a foncé dans la brèche en initiant lui-même une plate-forme de débat sans attendre celui du Président ! (à laquelle j'ai participé : http://demsf.free.fr/index.php?post...). Mais début janvier, L'Avenir Pour Tous a posté des propositions sur cette plate-forme et suscité quelques milliers de signatures. C'est ce qui a fait parler du débat dans les médias, conduit Mme Jouanno a répondre qu'elle n'avait pas le pouvoir de censurer les sujets proposés ou soutenus par les citoyens, et le gouvernement a poser des herses autour du débat… en ressortant l'argument "peine de mort". En résumé, pour un débat organisé par des institutions de la République, il y a un cadre de valeurs : celles dans la Constitution https://fr.wikipedia.org/wiki/Artic... … et ses préambules (dont la Déclaration des Droits). En ajouter ou retrancher ne relève pas du gouvernement mais du pouvoir constituant.
@jbl #1 " quand un gars se réfugie derrière le mot "valeurs", on peut être sûr de deux choses : 1. il ne sait pas ce qu'il veut dire 2. il est au bout de ses arguments et surtout de ses idées
Malheureusement ça fait quelques années que ça dure (le refuge derrière le mot "valeur") et que cela bloque tout débat d'idée... :-("
J'ai reçu récemment une invitation à une conférence du "responsable de l'éthique" (ou titre approchant) d'une grande entreprise. Je fais passer à un ami consultant qui intervient pour cette entreprise. Il me répond en avoir entendu parler : "cette personne est très critiquée en interne, justement sous l'angle éthique". Suggérant que les "valeurs", c'est comme la confiture…
Double de mon commentaire publié à l'instant sur Engagés pour Argenteuil
Gilets Jaunes : Grand débat national ou débattre du débat !
C. Jouanno présidente de la Commission Nationale du Débat Public (autorité administrative indépendante) se retire.
Raison invoquée : la polémique sur son salaire.
En réalité, elle pense que l'organisation d'un tel débat national sur la démocratie participative, la fiscalité, etc, ne rentre pas dans les compétences de son A.A.I.
Nous pouvons en effet nous poser la question.
Ce n'est pas avant tout un débat technique sur un grand projet d'aménagement mais un débat sociétal, politique.
Comme si nous demandions à Météo France (autre A.A.I.) d'organiser un débat sur la transition énergétique et la fiscalité à mettre en place pour y parvenir.
Sur Argenteuil, qui va organiser ce débat ?
Monsieur le Maire ?
Madame la Députée ?
Ce grand débat national ne peut pas se faire sans entendre les argenteuillaises, les argenteuillais.
"On ne tergiversera pas sur les valeurs. L’IVG, la peine de mort, le mariage pour tous, ne seront pas sur la table."
La majorité des Gilets Jaunes et plus généralement les français veulent s'exprimer sur l'équité fiscale, la transition énergétique, la démocratie participative mais nullement remettre en question les valeurs de notre République, le socle de ce qui nous unit.
Honte à la France si elle décidait d'ouvrir un débat en interne sur des valeurs universelles.
Des États votent à leur tour l'abolition de la peine de mort.
Des femmes de par le monde se battent pour obtenir le droit à l'IVG.
Si nous considérons que n'importe quel sujet n'est pas tabou et peut être débattu, alors nous sommes tombés dans une profonde et irréversible décadence.
@Bernard #5 : "n'importe quel sujet n'est pas tabou et peut être débattu" : c'est mon avis (quitte à être décadent). C'est précisément une chose dont ont souffert les homosexuels pendant des décennies : le fait que leur expérience était taboue et ne pouvait être débattue sous peine de l'accusation de décadence.
"Des États votent à leur tour l'abolition de la peine de mort. Des femmes de par le monde se battent pour obtenir le droit à l'IVG." : ce sont précisément les fruits des débats sur ces sujets. Sans débat, pas de progrès possibles, en tout cas dans le cadre démocratique !
Qui définit "le socle qui nous unit ?" : le peuple (ou ses représentants à une large majorité) quand il définit la Constitution. Pas Benjamin Griveaux, ni toi, ni moi !
En résumé : pour avoir la liberté de défendre mes opinions (sur des sujets comme l'IVG, la peine de mort ou l'ouverture du mariage aux couples de même sexe), je dois accepter la liberté de défendre les opinions opposées.
@ FrédéricLN
Nous sommes d'accord sur le fait qu'aucun sujet ne peut être tabou et doit être débattu mais je pense que nous nous sommes mal compris sur le contenu de mon dernier commentaire.
Vouloir débattre à nouveau sur des sujets comme l'IVG ou la peine de mort, c'est, de mon point de vue, vouloir (ou essayer de) remettre en question la loi sur l'IVG ou l'abolition de la peine de mort.
Sinon, à quoi sert de débattre sur des avancées sociétales et des libertés acquises par la loi ?
D'accord dans le principe. Effectivement nulle question démocratique ne doit être taboue. Avec le cas particulier de la peine de mort, qui est maintenant un engagement international (européen): Le bon niveau de discussion est donc l'Europe.
B.Griveaux fait de la politique à l'ancienne (partisane et boutiquière), mais pas de la vraie démocratie.
L'application est cependant sujette à caution.
On voit que le "grand débat" du CESE a été annoncé un peu en catimini. Les "vrais Gilets Jaunes", de faction sur leur rond-point avec leur petits smartphones ont peu eu l'occasion de contribuer ont site. Les partisans de la Manip pour Tous ont saisi l'occasion, et c'est tout à fait leur droit. Mais cela montre que le processus choisi par le CESE présente des déséquilibres par rapport à l'opinion publique, et des risques de manipulation. Et brasse trop large et de manière superficielle
Il serait mieux de filtrer les sujets par thèmes.
Ex ce mois-ci: les sujets fiscaux, économiques incluant l'aménagement du territoire, l'agriculture, la recherche, l'écologie
Dans 3 mois: les sujets sociétaux: divorce, PMA, euthanasie (eugénisme??)
Dans 6 mois: les sujets institutionnels incluant les rôles et avantages des élus et des administrations
Dans 9 mois: la sécurité, la justice.
Dans 12 mois: L'Europe, les relations internationales, le dialogue Nord-Sud.
Faudrait-il que les citoyens organisent le débat eux-mêmes? (très peu le temps en ce début 2019 d'affiner les outils open source pour créer un tel site, mais cela existe, à des coûts hardware raisonnable)
@Bernard #7 : je comprends bien. Pour préciser : il y a 2 choses différentes dans un débat : la question posée, et les réponses qu'apportent les participants. Tous ceux d'entre nous qui, comme toi et moi, ont organisé des débats ou pris part à des débats savent que les répondants ne rentrent pas toujours dans le cadre des questions initiales !
Marc Fesneau et François Bayrou l'ont bien dit ce matin chacun à sa façon : le gouvernement pose des grandes questions ; il ne doit pas y avoir de censure à la participation des citoyens. Cf. pour François Bayrou https://twitter.com/franceinfo/stat...
@XS #8 : le débat du CÉSE a pu commencer très vite (4 jours après l'annonce du Président de la République !) parce qu'ils ont l'habitude d'organiser des débats en ligne. De ce fait, c'était sans pression politique ni médiatique et en pleine trêve des confiseurs. Ça aura pu servir de "pilote" au grand débat en ligne que devait organiser la CNDP et qu'organisera j'ignore qui. Que des groupes organisés interviennent dans les débats et y pèsent plus lourd que les simples citoyens inorganisés et peu informés… c'est la nature (et un intérêt, et la faiblesse) de la démocratie participative. Un débat n'est pas un vote, c'est juste une façon de progresser collectivement dans la compréhension d'un sujet et des solutions possibles.
Le débat du CÉSE était structuré en 6 thèmes qui recoupent les 4 actuels du gouvernement. Faut-il les aborder un par un ? On aurait pu, je crois, à condition de commencer il y a dix ans… (je l'avais proposé dans la campagne 2007, intervenant comme représentant de la campagne François Bayrou…). Je crois que maintenant le couvercle de la boîte a sauté et qu'il faut faire face sans plus attendre à la diversité des sujets soulevés.
Si le couvercle de la boite a sauté, j'espère au moins que cela ne va pas finir comme au Rwanda (au Royaume-Uni, avec les gilets jaunes Brexiters on s'en rapproche ..)
Il faudrait que le débat soit audible. Or depuis 10 ans, tous les médias notamment y compris les médias Internet sont engloutis sous les attaques et injures. C'est de pire en pire (à l'exception du Gorafi, privilège de l'humour)
Donc il faut ordonnancer cela, mettre les projecteurs sur différents thèmes.
Pour Chantal Jouanno, il semble qu'elle n'ait pas totalement jeté l'éponge (même si B.Griveaux a encore gaffé). Enfin, si vous arrivez à suivre .
http://www.lefigaro.fr/politique/20...
Si elle fait son boulot et accepte de gagner comme un conseiller hors classe (à l'image de ce que faisait Martin Hirsch quand il était Haut Commissaire) cela tiendra la route.
Sur le sujet du métro, un article signalant un impact culturel:
https://www.latribune.fr/opinions/t...
Édouard Philippe présente les broyeuses qui détruiront toutes les propositions faites lors du Grand Débat National:
http://www.legorafi.fr/2019/01/10/e...
C' est peut-être hors-sujet, mais cela vaut le détour:
https://twitter.com/le_gorafi/statu...
Le programme de Macron, on en parlait déjà en 2017:
http://www.legorafi.fr/2017/03/22/e...
Devons nous ou pas débattre de tout ?
Dans une démocratie, il est évident qu'aucun sujet ne doit être censuré.
Voltaire déclarait "je ne suis pas d'accord avec vous mais je me battrai pour que vous puissiez le dire"
Maintenant, nous sommes dans un contexte bien particulier.
30 ans de reculades, de faux fuyants, de mensonges ont engendré le climat violent et revendicatif que nous subissons depuis 2 mois.
Le Gouvernement lance un débat national.
Je pense toujours qu'il faut rester dans les thèmes voulus par le Gouvernement et demandés par la majorité des Gilets Jaunes pour en tirer des avancées pour notre pays.
En revanche, pour chaque thème, nous ne devrons rien nous interdire et analyser toutes les propositions qui seront faites même si nous les considérons comme extrêmes (par exemple, le SMIC est-il ou non un frein à l'emploi)
Ce qui me dérange le plus avant ce débat, ce n'est pas d'aborder ou pas tel ou tel sujet mais plutôt d'annoncer déjà que l'on ne reviendra pas sur ce qui a été fait depuis 2017.
Si ce débat national ne sert qu'à donner un quitus au Gouvernement sur sa politique, alors effectivement il ne servira à rien.