Voilà bientôt 3 ans, face à la crise économique et financière, un responsable politique proposait une mesure de nature à arrêter net la spéculation sur une faillite de la Grèce, du Portugal, ou de tous autres États individuels.
Une mesure qui aurait donné le temps à l'Europe, à la zone euro, à ses États, de restaurer l'équilibre de leurs finances et d'éviter pour longtemps de dépendre de leurs créanciers, des agences de notations, des spéculateurs et autres profiteurs potentiels de la déroute.
Entre temps la dette publique de la zone euro est passée de 66% du PIB en 2007 (à la limite de la valeur jugée "soutenable" de 60%) à 70% en 2008, 79% en 2009, 85% en 2010 : hors de contrôle.
Une euro-obligation serait, aujourd'hui, une obligation pourrie.
Mme Aubry, M. Fabius, M. Hollande et compagnie se réveillent sacrément tard.
Le gouvernement allemand a très sèchement bloqué cette idée. Pas seulement parce qu'elle coûterait cher au grand pays aujourd'hui le plus digne de confiance au plan financier, qu'est l'Allemagne ("Au bout de dix ans, le coût total serait de 20 à 25 milliards d'euros, selon les calculs du ministère des Finances.").
Mme Merkel a sa petite phrase : «Les euro-obligations ... nous amèneraient à une union de la dette et non à une union de la stabilité».
Le Ministre des Finances Wolfgang Schäuble explique, de façon très juste à mon avis, qu'il n'y aurait pas de pilote dans l'avion de cet endettement européen, et qu'il faut du temps pour mettre un tel pilotage en place. En attendant, il y a une crise à gérer, et pour gérer une crise il faut d'abord faire ce qu'on peut faire (c'est-à-dire qu'il y a des États souverains, responsables de leurs finances et susceptibles de faire faillite, une clause de non-renflouement, et des primes de risque encaissées depuis des années par les prêteurs… parce qu'il y avait un risque de faillite).
En langage de Ministre des Finances, cela donne, c'est M. Schäuble qui parle :
Schäuble se dit pour sa part personnellement disposé à transférer la souveraineté nationale à Bruxelles pour assurer la stabilité de la zone euro sur le long terme mais il a ajouté que la zone euro elle-même n'était pas prête à cette éventualité.
«En tant que personne, Wolfgang Schäuble serait déjà prêt (à déléguer la souverainté à Bruxelles). L'idée d'un ministre des Finances européen ne me pose aucun problème».
«Mais en tant que ministre des Finances je dis qu'il est de notre devoir de résoudre les problèmes ici et maintenant, et ce le plus rapidement possible sur la base des contrats existants».
«Avec l'instauration d'une union budgétaire, Bruxelles doit avoir le droit de reprendre des prérogatives budgétaires à des pays qui ne respectent pas les règles, ainsi que (de) prélever ses propres impôts et de créer un organisme commun pour émettre des emprunts.»
En d'autres termes : les euro-obligations sont une solution d'avenir, si nous persévérons dans le choix d'une monnaie commune. À condition que les déséquilibres d'États donnent lui, non à sanctions financières grotesques et injustes, mais à une tutelle des institutions européennes sur le budget. À condition d'instaurer un impôt sur les sociétés européen, avec un contrôle strict sur les prix de transfert.
C'est une option ; l'autre est de revenir au franc, et je n'en vois pas de troisième.
Dans un article publié sur son blog, Robert Rochefort propose la mise en place immédiate d'une Agence Européenne de la Dette (AED) : "Pour avancer rapidement dans la mise en place de cette AED, il serait possible de commencer seulement par les emprunts à court terme des Etats, qui constituent en quelque sorte leurs fonds de roulement. Sait-on, par exemple, que la Grèce emprunte toujours à 3 mois à 4 pour cent, soit un taux trois fois plus élevé que la moyenne de la zone euro ? Lancer des "bons du Trésor" européens à moins d'un an, avec l'assistance technique de la Banque centrale européenne, serait chose facile et ne requerrait pas une lourde machine. Ces bons pourraient même être ouverts à la souscription pour tous les citoyens européens qui souhaitent investir dans un placement financier à court terme." (http://www.robertrochefort.eu/)
Je ne vois pas bien en quoi une émission de bons à court terme serait une solution... (à la fois je ne suis pas un financier mais juste un père de famille.) Quand les politiques auront-ils des idées à long terme ? Par exemple en pensant à des solutions qui correspondraient à ce que nous lèguerons à nos enfants.
Si je comprends bien Schlaube, il faut mettre en place une gouvernance financière européenne de transition qui permettrait aux états qui sont "out" au niveau de leur dette de s'en remettre progressivement (si ils en ont envie !) Cela revient pour moi à remettre en cause l'UE actuelle pour tenter de repartir à zéro avec une nouvelle union. Cela prouverait au passage qu'il ne s'agit bien que d'une union économique. Mais peut-être que je n'ai rien compris ? En tout cas, la solution de Schlaübe me semble être de bon sens et comme on dit en terme contractuel dans le secteur privé, cela me semble relever d'une gestion "en bon père de famille." bref, c'est finalement ce que tout citoyen raisonnable demande à ses politiques...
"en bon père de famille" n'avez-vous pas eu des cauchemars parce que la vente de votre appartement traînait alors que vous vous étiez engagé pour en acheter un autre ? Le banquier vous attendait avec son crédit-relais au taux défiant toute concurrence. Il me semble que des "bons du Trésor" européens à moins d'un an peuvent éviter quelques cauchemars aux pays de la zone euro et leur permettre de booster leur économie. Certes les banques pleureront, mais c'est un moindre mal.
Je ne résiste pas à citer une histoire qui a circulé sur le net et reprise par J.Attali :
«Dans un village qui vit du tourisme, il n'y a plus de touristes, à cause de la crise.
Pour survivre, tout le monde emprunte à tout le monde. Plusieurs mois passent, misérables.
Arrive enfin un touriste qui prend une chambre dans l'hôtel, qu'il paie avec un billet de 100 euros.
Le touriste n'est pas plutôt monté à sa chambre que l'hôtelier court porter le billet chez le boucher à qui il doit justement cent euros.
Le boucher va lui-même aussitôt porter le même billet au paysan qui l'approvisionne en viande;
Le paysan, à son tour se dépêche d'aller payer sa dette à la prostituée à laquelle il doit quelques «services».
La prostituée va à l'hôtel pour rembourser à l'hôtelier les chambres qu'elle louait à l'heure. Comme elle dépose le billet de 100 € sur le comptoir, le touriste, qui venait dire à l'hôtelier qu'il devait repartir tout de suite, ramasse le billet et disparaît.
Au total, chacun a payé sa dette; rien n'a été dépensé, ni gagné, ni perdu, par personne.
Et plus personne dans le village n'a de dettes."
Je trouve que c'est une RAZ qui peut avoir son utilité... si elle ne limite pas aux seuls villageois banquiers.
ok... comme je le disais, je ne suis pas un financier et ne comprends pas exactement ce que vous appelez un "bon du trésor"... ce que je comprends c'est que c'est du court terme ! et ce que je sais, c'est que ça ne suffira pas.
Pour continuer dans les paraboles décalées, soigner un cancer avec un pansement n'est, paraît-il, pas suffisant, si ce n'est pour éventuellement guérir une plaie conséquente du dit cancer...
Mais après tout, peut-être que je ne comprends rien ! (le niveau du présent site est plutôt trop relevé pour moi !!! )
@ Jacques Rioland et jbl : merci pour vos commentaires et cette discussion !
Je n'ai plus trop la pêche pour poursuivre le débat car il est, de toute façon, plié ... http://www.lefigaro.fr/conjoncture/... comme on pouvait le constater d'avance sur les courbes d'Olivier Berruyer http://www.les-crises.fr/notations/ (2ème graphique)