Je me joins aux approbations de quasiment toute la classe politique : oui, dans le cadre des résolutions onusiennes, le président Hollande a bien fait d'envoyer notre armée stopper la colonne djihadiste en route vers Mopti et, sans doute, Bamako[1].

J'entendais Jean-Dominique Merchet expliquer hier à la radio : les djihadistes savaient leur sécession condamnée à terme. Les pays de la CEDEAO, avec un financement et du matériel franco-américains, ont largement la capacité de reprendre et contrôler les villes du désert. Quitte à devoir affronter une guérilla des sables pendant dix ou vingt ans.

Donc, expliquait Jean-Dominique Merchet, ils ont pris l'initiative. Un raid sur Bamako, à la façon de ceux réussis par le passé au Tchad ou en Centrafrique, leur permettrait d'inverser la situation juridique : le gouvernement c'est eux, les sécessionnistes les autres.

Et sans doute d'inverser la situation politique, car, comme le rappelle Philippe Bernard dans Libé, "les islamistes comptent aussi des soutiens parmi la population du Sud", tout comme al Qaïda en compte au Pakistan, au Yemen, en Syrie et ailleurs.

Les djihadistes du Nord espéraient sans doute, ou espèrent encore, susciter ou décréter une révolution islamiste sur les rives du Niger — ce qui ne serait que la 3 ou 4ème conquête djihadiste victorieuse de l'histoire du Mali.

C'est un enjeu pour le monde entier, car la première priorité pour un mouvement cherchant à restaurer le Califat, c'est de se créer une base territoriale. L'Afghanistan perdu, la Somalie dénoyautée, Gaza surespionné, l'Azawad fragilisé, quelle sera la prochaine cible ? La Mauritanie, la Libye, la Somalie de nouveau ?

En attendant — François Hollande a bien fait, mais chaque homme et chaque arme française envoyées sur ce théâtre d'opérations signifie beaucoup de citoyens et de moyens maliens en moins au combat contre les djihadistes. Chaque jour de guerre des Blancs contre les gens du Nord éloignera les gens du Sud. Le sablier coule et ce genre de travail ne finit jamais. Pourvu que notre Armée sache partir aussi vite qu'elle est venue, même si le "travail" n'est pas fini, même s'il ne s'est pas écoulé, ce "temps qu'il faudra" auquel notre Président faisait référence.

Notes

[1] Déclameur : je n'ai pas mis les pieds au Mali, sinon peut-être un transit par l'aéroport de Bamako (?), et en bon blogueur, je parle ici de ce que je connais fort mal.