Je développe en commentaires chez Art Goldhammer, ma politologie à deux balles sur le positionnement prévisible de Nicolas Sarkozy ce lundi et dans les jours suivants.

Pour Art,

En rejetant ses comptes de campagne, le Conseil constitutionnel lui a donné une excuse pour en démissionner, et se relancer dans l'arène politique. Qui plus est, il a donné à l'UMP une bonne raison de lui souhaiter la bienvenue. Ce n'est pas que les militants de base ne voulaient pas de lui : il reste très populaire parmi les électeurs de l'UMP. Mais pour ce qui est des leaders… Fillon l'a attaqué dans le passé, et Copé ne saurait sûrement pas quoi faire d'un rival aussi puissant pour la prochaine candidature à la présidentielle. Pourtant, la parti est à Sarko s'il veut le prendre - si seulement les juges et les tribunaux lui en laissent le loisir. Hélas, il est impliqué dans tant de scandales, que les temps qui viennent devraient être troublés. Mais son retour au centre de la scène est susceptible d'être fracassant.

Je suis d'accord, avec quelques nuances.

Jean-François Copé, actuel président de l'UMP, a tout intérêt à pousser pour le retour de Nicolas Sarkozy. Ce coup devrait éliminer de la scène le désormais trop peu sarkozyste François Fillon, et, si jamais la justice arrêtait Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé en apparaîtrait comme le fidèle et naturel héritier.

Mais Nicolas Sarkozy a une autre option pour se débarrasser à la fois des réseaux constitués au sein du parti par François Fillon et de ceux de Jean-François Copé : créer son propre parti, comme Jacques Chirac l'avait fait avec le RPR. Il obligerait l'UMP à se dissoudre, comme cela s'était produit avec l'UDR. Il forcerait les dirigeants UMP et ses parlementaires à lui faire personnellement allégeance, comme Chirac y avait forcés les «barons du gaullisme».

Et l'ardoise de la campagne présidentielle 2012 fournirait un excellent prétexte à cette dissolution / refondation : le moyen d'échapper à la persécution du pouvoir socialiste et de sa justice aux ordres[1].

L'argent, nerf de la guerre, pourrait faire la décision. Dissoudre l'UMP laisserait ses banques avec ses ±50 millions d'euros de dette. Mais cela signifierait aussi la perte, pour les 4 prochaines années, de 6,7 millions d'euros par an (l'aide publique attribuée sur la base du nombre de voix lors des élections législatives de 2012). Cela laisserait 20 bons millions de gagnés, mais il faut encore en retirer la valeur du siège, payé 40 millions.

Le nouveau parti, si tous les sénateurs et les Députés consacrent leur part de financement à elle, obtenir € 13 millions d'aide d'État par an. C'est assez pour payer un bon personnel en normes françaises (le Modem, vit avec 1 million / an), mais pas assez pour se payer un siège à la hauteur du précédent.

Tous comptes faits, peut-être la meilleure stratégie pour Nicolas Sarkozy serait-elle celle du "feu sur le quartier général" : s'appuyer sur la jeune génération sans scrupules de la "Droite forte" pour prendre le contrôle de l'activité nationale du parti, tout en laissant les barons, ducs et marquis aux batailles municipales.

La constitution des listes UMP pour les élections européennes pourrait donner l'occasion de ce réalignement "à droite toute". Nicolas Sarkozy pourrait alors en prendre la tête[2], comme l'avaient fait en leur temps, non seulement Jacques Chirac sans succès en 1979, mais plus brillamment Valéry Giscard d'Estaing qui, en 1989, écrasa la liste du Centre de Simone Veil et… François Bayrou.

Notes

[1] ;-)

[2] Francilienne, compte tenu du mode de scrutin.