Journées politiques chargées, au niveau national. Presque de quoi m'intéresser et me sortir des questions argenteuillo-argenteuillaises ;-) !

Il y a quelques jours, c'est officiel : 0% de croissance au 2ème trimestre comme au 1er. Double zéro à la politique économique nationale, pas plus efficace que celle de son prédécesseur, puisque tout aussi inconsistante.

Mercredi, Alain Juppé se porte volontaire pour présider la France en 2017. Après un senior énergique et délirant, et un senior compétent et immobiliste, nous aurions un senior énergique et compétent. Là où nous en sommes, c'est presque une bonne nouvelle. Si au moins, nous avions à la barre quelqu'un — qu'il ou elle vienne de gauche, du centre ou de droite…

Si l'élection avait lieu dans six semaines, Alain Juppé serait élu haut la main, si ce n'est au premier tour[1]. Mais d'ici 2017, il y a le choc des primaires UMP contre le réputé-invincible Nicolas Sarkozy, il y a les marais délétères parisiano-médiatiques, il y a le vide abyssal du projet de la droite française, il y a le Front National en embuscade, il y a la faiblesse du centre, des démocrates, des écologistes qui devraient être le ciment de toute majorité de redressement national. Si Alain Juppé passe tout ça, il aura prouvé que redresser la France est dans ses cordes.

François Bayrou a dit dimanche sur RTL presque exactement ce que j'en pense (comme souvent), alors inutile d'en rajouter.

Vendredi ou dimanche, deux ou trois ministres expliquent qu'ils voudraient une "vraie politique de gauche" ; ce qui se résume, selon eux, à dépenser plus, emprunter plus, se rapprocher plus vite de la faillite nationale, et chercher des poux dans la tête des voisins qui entreprennent et réussissent. Du génie à l'état pur.

La lettre d'Aurélie Filipetti à "Cher Manuel, monsieur le Premier Ministre, mon cher Manuel" est tout de même un beau numéro de copinisme partisan : "François, je t'ai soutenu dès la primaire de 2011 et j'ai participé ardemment à la campagne de 2012" : ça pose le niveau de la réflexion et des propositions !

Ce lundi, le Président de la République invite Manuel Valls à proposer un nouveau gouvernement "en cohérence avec les orientations qu'il a lui-même définies". Comme, au bout de 5 mois, je ne suis pas arrivé à me représenter lesdites orientations, je suppose que les mots qui comptent sont "cohérence avec… lui-même". Un dernier carré des barons du socialisme — ils n'ont plus guère d'électeurs, mais encore deux ans et demi dans les salons de la République, autant en profiter avant la retraite finale.

Sans les Verts, sans le MoDem, sans le PCF, sans le parti de gauche, sans les courants "de gauche" du PS, sans grand monde de la société civile, ça fait de la place pour d'autres préretraités — Paris Match prétend que l'on a proposé un strapontin, un fauteuil, un maroquin même, à Jean-Louis Borloo. Qui aurait refusé ; pensant, certainement, qu'il n'y a rien à faire dans cette galère.

Et François Bayrou ?

Si j'avais été François Hollande, je lui aurais proposé l'Économie en 2012 ; les Affaires Étrangères à Marielle de Sarnez, les collectivités locales à Jacqueline Gourault. Mais vous aurez noté que je ne suis pas François Hollande, et réciproquement. Lui pratique le tuuk gilli, comme on dit en pays moaga si je me souviens bien : prends tout ce que tu peux pour toi et les tiens, à quoi bon partager ? quitte à travailler avec des ingrats, autant choisir des ingrats qui dépendent de vous.

De toute façon, on n'est plus en 2012 mais en 2014. La majorité en place a multiplié les justes analyses et les calculs pertinents, et totalement démontré son incapacité à concrétiser. Il est trop tard pour appeler un François Bayrou où que ce soit, sinon à Matignon, qui ne se refuse pas.

Mais par quel miracle François Hollande aurait-il pareille idée ? Après 30 ans de "com'" à la place de la politique réelle, après 10 années pendant lesquelles cette "com'" a été revendiquée par les "gouvernants" comme alternative à l'action effective, nous avons depuis 2014 un communiquant professionnel à Matignon : consécration officielle de L'ère du vide.

Difficile d'espérer un retour à la réalité !


Peut-on faire pire que le gouvernement actuel ? Oui bien sûr. Il suffirait de revenir au sarkozysme, de confier le bateau aux mélencho-montebourgeois, ou d'élire le FN.

Peut-on faire mieux que le gouvernement actuel ? Oui bien sûr. Il suffirait de gouverner comme n'importe lequel des pays européens qui nous entourent[2], de droite, du centre, de gauche ou de "grande coalition" ; des pays où les gouvernants gouvernent, où les décideurs sont conscients des atouts et des risques de leur pays, où la crise n'est pas considérée comme une fiction médiatique.

Mais qui confiera les responsabilités nationales à des gouvernants décidés à gouverner, à des décideurs conscients, à des capitaines courageux ?

Notes

[1] Un pronostic qui ne risque rien.

[2] Sauf peut-être l'Espagne, dont je n'ai pas encore compris la stratégie.