Bonne nouvelle pour l'Europe : un pays se débarrasse de la caste politico-affairiste qui a coulé les finances du pays. Une nouvelle génération arrive aux responsabilités, à gauche avec Syriza, au centre avec ToPotami, des gens qui auront les mains libres pour prendre des décisions, pour redresser l'économie et la société grecques.

Mauvaise nouvelle pour les Européens : c'est nous qui allons payer la facture.

@PatRomedenne ouvrait sa revue de presse sur Télématin par la vieille histoire du voisin[1] :

un homme est couché auprès de sa femme et l'empêche (de dormir) en se retournant sans cesse, visiblement très perturbé par un problème. Lasse de cette situation elle finit par allumer la lumière et l'interroge sur son tracas. Alors il lui explique qu'il a emprunté 1000 € au voisin d'en face et qu'il ne va pas pouvoir lui rembourser comme il l'avait promit .
— Ah bon, c'est ça ton tracas ?
Elle se lève, ouvre la fenêtre et interpelle le voisin d'en face. Celui ouvre ça fenêtre et elle lui cri :
— mon mari ne te remboursera pas !!!
Elle ferme sa fenêtre se recouche, et dit à son mari :
— tu vois, s'est pas compliqué, maintenant dort,c'est lui qui ne dort plus !

Et Patrice Romedenne de conclure : le voisin, c'est nous.

Pour chiffrer les choses, chaque ménage français en aura pour environ 1000 euros, c'est justement le chiffre qui figurait dans cette blague : la quote-part française dans la partie de la dette grecque sur laquelle il faudra tirer un trait[2].


Est-ce la faute de Syriza ? Pas du tout : le FMI a écrit depuis des années que la dette grecque était impossible à rembourser, et qu'il faudrait bien tirer un trait dessus. Syriza propose simplement de le faire au lieu de continuer à entretenir une fiction qui pervertit tout effort de redressement. C'est comme pour un ménage ou un service public : alimenter le surendettement pourrit les situations, à un moment, il faut "apurer", et tant pis pour ceux qui avaient prêté à mauvais escient.

Est-ce la faute de ceux qui avaient prêté à mauvais escient ? Oui, bien sûr. La faute aussi des gouvernements grecs des années avant 2008, de Nouvelle Démocratie particulièrement, et de Goldman Sachs pour avoir maquillé la situation du pays, comme chacun sait. Mais les prêteurs ont-ils sérieusement contrôlé cette situation ? Ils étaient trop heureux de trouver un pays "zone euro" où placer plein d'argent, et fermaient les yeux.

Ils devraient donc renoncer à leur argent, "prendre leur perte" comme on dit en finance. Mais ils ne le feront pas. Parce qu'entre temps, ils ont réussi à refiler les prêts à quelqu'un d'autre : nous. Les États européens, donc, les contribuables, les ménages. Beau tour de passe-passe.

Ils ont trouvé à l'époque un prétexte géant : la rumeur selon laquelle "la zone euro était en danger". Le fantasme selon lequel la Grèce risquait de sortir de l'euro, et/ou que, si la Grèce se déclarait en faillite, la monnaie européenne s'effondrerait.

J'ignore encore aujourd'hui si cette vaste blague est née tout seule — ou d'une belle campagne de lobbying souterrain ; dans tous les cas, ça a marché — et même influencées par des lobbyistes, les institutions démocratiques restent responsables de leurs décisions.

Ce ne sera pas faute d'avoir alerté, expliqué. Mais ça ne console guère, pour nos 1000 euros.

D'autant que les 4 années d'austérité forcée, de coupes budgétaires sans réformes en profondeur, de passage au "noir" de l'économie grecque, n'ont fait que gonfler la facture.

Espérons qu'au moins la leçon serve pour la France !

Une économie saine, c'est un pays, c'est une Europe qui se coltinent le monde tel qu'il est.

Notes

[1] Je reproduis, avec fôtes, la version racontée par une internaute en commentaires ici

[2] La version de Patrice Romedenne n'était pas chiffrée. La part irrécouvrable de la dette grecque représente environ 100% du PIB soit 100200 milliards d'euros ; M. Moscovici refuse de chiffrer la part française dans cette dette (en direct, à travers le FMI dont la France est actionnaire, etc.): je prends le pari que 25% est une bonne estimation. En fait un peu moins, la part française serait donc de 49 milliards sur la dette totale, et autour de 30 milliards sur la partie non recouvrable, soit ±1200 € par ménage — mise à jour 26 jan. 15.