Hervé Torchet consacrait, en fin de campagne des cantonales, un merveilleux billet à l'activité politique :

Les vrais politiques, ceux qui font quelque chose, cela se sent tout de suite. Quand on voyait Jean-Christophe Lagarde à dix-huit ans, on était impressionné, chacune de ses pulsations était politique, chacun des mots qu'il prononçait était politique, il n'avait pas d'autre but que politique, pas d'autre idée, pas d'autre approche. Et quand je dis politique, je veux signifier par là ce qui dans la politique relève des enjeux de pouvoir. La vie de Lagarde se construisait autour, par et dans le pouvoir. (...)

Quand il avait dix-huit ans, nous considérions Lagarde comme un fou, lui qui se fixait l'objectif de prendre sa ville, Drancy, au Parti Communiste Français qui la tenait depuis des décennies. Pourtant, il n'avait pas trente cinq ans quand il y est parvenu. C'était plus fort que lui, et donc trop fort pour ses adversaires.

Dans le monde tel que nous le vivons, la politique prend donc non pas énormément de temps, mais la totalité du temps, elle ne laisse aucune place à quoi que ce soit d'autre, elle est totalement la vie. De ce fait, elle est très peu compatible avec une activité salariée. La première règle est donc, pour qui veut jouer un rôle en politique, de se doter d'une base logistique : une entreprise à soi, un réseau lucratif, une sinécure juteuse et consonante avec son but politique.

La suite, qui se passe dans les placards des hypermarchés, est d'ailleurs plus croustillante.

Et pour conclure :

L'argent, il en faut dans la politique. Il en faut vraiment, et parce que nous sommes qui nous sommes[1], il en faut qui soit honnête, non pas extorqué à un hypermarché, ni à quiconque. C'est cela par-dessus tout que j'appelle une base logistique. Ce peut être une organisation qui permette de gagner de l'argent sans risquer les coups de l'adversaire. Bref.

Une fois qu'on a une base logistique, il faut se constituer une base sociologique.

Puis la troisième étape, c'est la crédibilité. Les étiquettes politiques servent souvent à cela, à la crédibilité (on ne peut plus dire à la respectabilité).

Voilà, une fois que l'on a 1° la politique dans le sang, 2° une base logistique, 3° une base sociologique, 4° une crédibilité, on est sur les rails pour jouer un vrai rôle en politique, chacun à son échelle.

Bonne chance à tous ceux qui sont candidats.

J'aime ce billet, et je le constate moi aussi : on ne peut guère faire de la politique, si on a besoin de travailler pour vivre.

On peut, bien sûr, faire de la politique en non-professionnel, sans argent ou avec peu d'argent. C'est ce que nous faisons à Argenteuil. Mais on ne peut le faire que très peu de temps, et avec très peu d'impact.

Acquérir une surface, ou un poids, politiques, ça demande de voir et revoir des milliers de gens (dont des centaines de gens influents), ce qui demande un temps et une énergie gigantesques. Et je trouve ça normal. Je préfère encore ça au parachutage d'énarques.

Ce qui me contrarie, ce que je n'accepte pas, c'est que cette possibilité pour faire de la politique, ce financement de l'activité politique, puissent venir de fortunes privées (style hypermarchés ou affaire Bettencourt) ou d'un détournement de l'argent de l'Etat (permanents syndicaux occupés à faire de la politique, etc.).

C'est ça qui biaise, pourrit, abaisse la politique, et rend la classe politique inapte à relever la France.

Notes

[1] Nous : le centre démocrate.