C'est encore un commentaire sur l'excellent blog de Jean-François Kahn, et un des derniers, puisque l'auteur ferme son blog, devenu déversoir de commentaires agressifs, insultants ou ineptes (au temps pour moi !). "Il faudra imaginer d’autres formes d’interventions collectives", conclut-il.

Le problème, tout le monde bute dessus, c'est de construire cette alternative dont l'urgence hurle à nos oreilles.

Et techniquement, en politique (ce n'est pas le cas partout), les solutions sont si évidentes que le problème n'est pas là. La politique est si dominée par l'affrontement des clans, qu'il suffit de s'en abstraire, de regarder et écouter le monde réel, pour trouver les réponses à ses crises.

Chacun de ceux qui essaye (en déplorant que ce n'ait été fait, avant, par personne !) trouve les mêmes réponses que ses prédécesseurs, ou à peu près.

Le seul tout petit problème est que, si on s'abstrait de l'affrontement des camps, on est éjecté du ring. Les réponses qu'on a trouvées ne servent à rien[1].

Un professeur et commentateur m'écrivait il y a quelques jours : la politique n'est pas affaire de raisons, et encore moins de bonnes raisons.

L'angoisse existentielle de l'intellectuel en politique, est vieille comme Platon, et plus. La tentation du despotisme éclairé (l'espoir de souffler ses répliques à un acteur puissant) est tout aussi vieille, et aussi la déception du croyant berné.

Tout de même, en démocratie, j'imagine pour l'intellectuel un autre rôle en politique que celui du faisan (ou du pigeon...) : imaginer, concevoir, organiser, et même construire une organisation différente de l'action citoyenne ; une organisation de nature à produire le changement qu'elle promeut.

Il y a eu aux débuts du MoDem un peu d'espoir qu'il en soit ainsi, et beaucoup d'investissement de beaucoup de monde, pour que cela se produise. Il y a encore un peu de ce genre d'investissement, comme une réplique sismique, du côté d'Europe Ecologie, avec les mêmes chausses-trappes qui devraient hélas produire les mêmes effets.

Mon rêve récurrent, c'est qu'il y ait une association pour ça, avec des sous évidemment. Une "Fondation du Tiers-Etat". Destinée non pas, comme les autres fondations, à réunir des experts sur papier glacé, mais à catalyser la démocratie. A trouver où ça marche, comment, à former, enseigner, participer, tester, évaluer. A faire fermenter la révolution démocratique.

Il y a déjà la FPH, qui est très bien (et sans doute d'autres) ; celle que j'imagine serait plus grand public, plus réactive à l'actualité, ancrée dans les troquets et sur les blogs comme les Encyclopédistes l'étaient dans les cafés. Mais y a-t-il dans notre beau pays assez de monde pour croire la démocratie possible et réalisable ?

Notes

[1] Tandis que si on reste sur le ring, saoulé de coups et les bras qui pèsent des tonnes, on n'a évidemment pas le loisir de se poser quelque question que ce soit sur ce qui se passe dans le reste du monde. A fortiori, de trouver des réponses.