Les mécanismes financiers, j'écrivais il y a quelques jours que je n'y comprenais goutte.

Mais hier, une de mes filles, en entendant les nouvelles à la télévision, me demande : "Papa, est-ce que c'est grave ? Est-ce que ça peut être comme la crise de 1929 ?" - comme quoi les cours d'histoire servent, même aux élèves de séries scientifiques.

J'ai dû répondre du tac au tac : il y a des entreprises qui ont besoin d'investir. Par exemple d'acheter des machines pour pouvoir fabriquer leurs produits. Elles n'ont pas forcément assez d'argent en caisse. Si les banques ne peuvent pas leur prêter cet argent, elles ne pourront pas investir, pas produire, pas embaucher, et oui, ça va être grave.

Réponse très médiocre, je m'en suis rendu compte tout de suite, je vous rassure. "Entreprises, investir, machines"… tout de suite je jargonnais comme un économiste du XIXème ou du XXème siècle ! Mais pour moi en vrai, c'est quoi, la crise financière ?

Bof. Je ne détiens aucune action[1], à peine un livret A, ma banque est une mutuelle :

La finance, autour, peut s'écrouler,…

Peu m'importent ses problèmes,… etc.

… Hmm. Je suis consultant indépendant, je vis de demandes ponctuelles venant pour la plupart de grandes entreprises : je dois prendre de plein fouet les coups de tabac de l'économie mondiale. La reprise serait mon oxygène, la crise peut m'étrangler. L'investissement des entreprises, c'est quand mon téléphone sonne.

La question de ma fille, 1929, portait sans doute sur nous tous qui travaillons hors du secteur financier - et les familles, les retraités, les élèves. Elle portait sur le rapport entre le secteur financier et "l'économie réelle", plus précisément le reste du monde économique.

Ce matin sur Télématin, un parlementaire américain qui a voté "non" au plan Paulson expliquait : nous Américains sommes attachés à la libre entreprise, les banques sont des entreprises, à elles de se débrouiller. Et la réponse des démocrates, c'est que les entreprises (et les entrepreneurs) ne sont pas indépendantes les unes des autres, en particulier, nous avons tous besoin de banques - une grande banque qui n'arrive plus à se débrouiller entraîne beaucoup de monde dans sa chute - une grande banque, c'est un service public.

Donc le public a intérêt à ce qu'une grande banque, même faillie, survive - le Crédit Lyonnais par exemple. Pour une petite banque, qui a une petite part de marché, c'est moins grave ; il faut être grande pour bénéficier d'une "assurance-vie publique gratuite". Ça explique les fusions-acquisitions : les soi-disant "champions nationaux, européens, mondiaux", multilingues, multiréglementations et multimétiers, n'ont aucune raison d'être plus performants que leurs différentes composantes ne l'étaient ; en revanche, ils bénéficient de la part de l'État d'une réassurance de fait, tout en échappant à fiscale l'emprise du même État, grâce à une subtile optimisation de la répartition de leurs opérations entre pays et fiscalités.

Je reviens au sujet de ma fille. Ce qui serait grave, plus que la dégringolade des cours (d'ailleurs je n'ai pas d'actions), plus que la faillite de banques (simple constat du pillage passé de leur actifs par leurs actionnaires et dirigeants), ce serait que le service bancaire ne soit plus rendu.

Cela dessine une espèce de porte de sortie pour les établissements qui n'auraient plus les moyens de poursuivre leur activité : avoir un contrat avec les pouvoirs publics, une délégation de service public, pour fournir à leurs clients leurs services financiers habituels, avec la garantie de l'État - non plus pour leur compte propre mais pour celui de l'État.

Cela ne fait sûrement pas sens à long terme : c'est de la socialisation au sens soviétique de l'activité bancaire. Mais à court terme, ça devrait permettre de distinguer l'argent privé et l'argent public, d'éviter que le public ne finance … le cambriolage de ses coffres par les actionnaires, partenaires et dirigeants de "grandes" bancassurances.

PS - comme je l'ai indiqué en introduction, je ne connais rien à la finance : la contradiction est bienvenue en commentaires !

Notes

[1] Ajout 3 mars : j'oubliais mon PERP : autour de 1300 € de perdus.