BenoîtB a écrit et multi-publié un billet qu'il espère sans doute fondateur : "Modem : l’urgence d’un projet !", et il commence fièrement : "Ce projet, les Français l’attendent...".
Je pourrais mégoter, décrypter. Dire d'un candidat ou d'un parti "il n'a pas de projet" signifie en politique "il n'a pas le pouvoir, on ne le voit pas gouverner". Le mot "projet, programme" parle en fait de rapports de pouvoir, parle de personnes. Mais justement... produire des "porteurs de programme" fait partie de la réponse[1] : cela répond en surface à la question du programme, en profondeur à la question du gouvernement. "Un projet" ce sont des gens avec du pouvoir - il est logique qu'au MoDem, la revendication "du projet" aille de pair avec celle de la collégialité, du travail collectif. Le public ne peut être réceptif à des propositions positives, en politique comme ailleurs, qu'une fois convaincu 1) de la nécessité d'un changement, 2) de l'existence de personnes prêtes à prendre le pouvoir. C'est ensuite qu'on regarde ce qu'elles proposent.
Je pourrais aussi faire la fête ! Le projet, c'est mon rayon. J'étais modestement de ceux qui ont poussé ce mot, pour qu'il remplace "programme". Ce que nous voulions proposer à la France, ce n'était pas un programme, ni commun ni pluri-annuel, c'était un projet qui lui permette de se projeter dans l'avenir, d'investir et de s'investir. Un "projet d'espoir", a très justement écrit François Bayrou. Ma fonction au sein de la campagne était justement celle de "conseiller pour les études et le projet", donc plus'qu'on promeut le projet, plus'que j'dois faire la fête...
Mais je suis, de tempérament, sensible aux matins blêmes. Y'avait une fête ... ici ... maint'nant ils sont partis (Charlélie Couture). Sur le blog de BenoîtB, j'y suis surtout allé d'une tournée d'avertissements. Vous y entendrez, en sourdine, mon espoir. Change we can believe in.
Benoît propose trois axes de travail :
- Quelle ligne directrice permettrait de nous emmener vers la société d’égalité croissante que nous appelons de nos voeux ?
- Comment contrer l’organisation oligarchique qui se met en place en France et au niveau de la planète, et quelle forme nouvelle de (démocratie) proposer comme alternative ?
- Comment conjuguer efficacité économique et sobriété environnementale ?
Ils me semblent absolument excellents. De quoi ont besoin ces questions ? D'être résolues, illustrées, synthétisées.
C’est toute la difficulté technique, en particulier pour une structure collégiale, groupe de travail physique ou virtuel. Ce qu'un groupe sait le mieux faire, c’est développer, détailler, décliner.
Résoudre ? Oui, on peut faire de la résolution de problèmes avec un groupe de volontaires engagés, qui acceptent de ne tirer aucun bénéfice personnel de leur travail - c’est une condition de succès de tout brainstorming - et jouent le jeu de techniques d'animation professionnelle. Je crois que les commissions thématiques de 2006 l'ont démontré.
Synthétiser ? Il faut presque toujours une personne pour faire la synthèse. Un collectif peut aider : des aller-retours entre un créateur et un groupe de travail améliorent une synthèse. C'est certainement ce qui manque au MoDem (et chez ses prédécesseurs depuis plus de 20 ans).
Illustrer ? Un groupe ne sait pas faire, il faut d’autres techniques - le reportage essentiellement, l’interview, l’observation.
Les moyens "du projet" sont donc d’un tout autre ordre que celui suggéré par nombre de commentateurs (en gros, demander à François Bayrou de jouer plus collectif). Et tout cela coûte beaucoup d’argent. Il y a au MoDem et dans son environnement, beaucoup de volontaires prêts à consacrer du temps à ce projet, mais le meilleur réseau de volontaires a besoin d’un suivi ou encadrement professionnel - et plus grand le réseau, plus cher le suivi.
Le projet démocrate, dans son état actuel, “on peut l’écrire en 10 pages très facilement”, observe un commentateur chez BenoîtB (archestratos). Tout le problème est là. Pour convaincre, il faudra que notre projet se dise en 10 mots, ou mieux en 4 mots, qui en soient l’essence, et que chacun puisse reconnaître ensuite dans les pages de propositions concrètes.
Comme l’écrit très bien ArnaudH, cultiver le secret sur le programme et la surprise stratégique, c'est s'interdire tout enracinement durable dans l’action des militants, l’esprit des journalistes et relais d’opinion, l’iconographie des médias. La méthode du petit comité secret produit des slogans prétextes, vides de sens et peu inspirants.
Mais faire autrement est difficile, très difficile. Arriver, à plusieurs personnes - deux, dix, cinquante mille, vingt millions ... - à une cohérence intellectuelle, de discours - sans réduire ces personnes au rôle de perroquets - c'est un exploit rare. Presque toujours il faut un penseur, parfois un binôme, qui développe et incarne une vision de l’histoire. Or c’est précisément l’atout maître de François Bayrou (aucune chance, d’ailleurs, qu’il souscrive un jour à un projet politique qu'il n’aurait pu faire sien).
Comment trouver, nous, la juste distance qui rende utile notre travail sur le projet, comment dépasser à la fois l’exercice naïf qui assemblerait les opinions, idées-comme-ça ou intérêts des uns et des autres,... et le psittacisme qui répéterait en boucle des citations du leader ?
À ma connaissance, plus de 90% des militants MoDem sont des gens attirés, voire inspirés, par la vision et le projet politique de François Bayrou. Et pourtant, ce projet n’a pas encore trouvé à s’exprimer de façon audible, enthousiasmante, convaincante pour tous les Français. Ça me semble ouvrir un champ, qui est précisément celui borné par les trois questions de Benoît : répondre aux défis clairement annoncés par François Bayrou (et Corinne Lepage, etc.), donner corps, chair, mots, images aux réponses philosophiques, de principe, qui nous réunissent comme démocrates.
Comme dirait l’autre, yapuka…
Notes
[1] Il y a au Parti socialiste des antiphrases qui le disent de façon très rigolote : "le candidat portera le projet du parti", "mon candidat c'est le projet", etc.
"Les moyens "du projet" sont donc d’un tout autre ordre que celui suggéré par nombre de commentateurs (en gros, demander à François Bayrou de jouer plus collectif)."
-->merci!! enfin un qui voit plus loin que le bout de son nez... bon, j'hésite, est-ce que je vais la recopier sur tous les blogs avec un lien jusqu'ici ou bien est-ce vain (ou déplacé) ? ^^
Aîe, aïe, aïe ! Sous-entendrais-tu Frédéric que nous ne comprenons même pas le programme qui a été pondu par des gens trop intelligents pour nous ? Les Modem, rien que des perroquets ?! Mélanger orange et vert remarque c'est vachement bon...
Alors un slogan, dis-tu ?!
Pour le moment, avec "Projet d'espoir" (2 mots) et "Mouvement Démocrate" (2 mots aussi) nous ne pouvons pas vraiment faire ton slogan de 4 mots. Parce que le mouvement peut se faire dans tous les sens... à la fois. Et les démocrates, tous les politiques s'en revendiquent. Pourtant comme tu le dis, un projet pour retrouver l'espoir c'est formidable !
CAP21 a des mots pas mal "Citoyenneté Action Participation pour le 21ème siècle". Là tu as tout : programme, objectif et moyens d'un coup non ?
D'ailleurs si le MoDem devenait plus vert qu'orange, ce serait peut-être dans l'air du temps.
J'ai lu aussi sur un blog hier que si François Bayrou se présentait comme président, il faudrait que Corinne Lepage se présente comme premier ministre; personnellement j'adhère complètement. L'inverse peut d'ailleurs être tout à fait envisagée : Elle présidente et Lui premier ministre. Finalement, que voulons-nous sinon de l'efficacité ?
Ou une présidence collégiale, ce n'est pas mal aussi... Je crois que cela existe dans un Parti encore en construction.
Au fait, si on trouve 4 "autres-mots-originaux-fédérateurs" pour le slogan... qu'est-ce qu'on gagne ?!
Bises à Florent
Je ne sais pas si j'ai raison de vouloir aider un militant MODM qui ne veut toujours pas voir que son héros (son pote) ne sera jamais président parce qu'il ne sait pas jouer collectif
Mais bon, un slogan en 4 mots, c'est à mon avis un de trop : 4 suggère trop la parité et en plus la double parité avec le risque de l'opposition
alors 3 c'est mieux pour l'équilibre comme l'ont compris et les chrétiens avec la trinité, et les auteurs de pièces de boulevard avec le mari la femme et l'amant(e)
Bon donc 3
il y a bien un slogan excellent
J'avoue qu'il n'est pas de moi
Mais plus je le creuse, plus je le trouve bon
Évidemment, après, le travail consiste à le décliner de manière crédible
Très bon , non?
Ah oui je ne l'ai pas dit !
Mais tout le monde le connait !
Liberté, égalité, fraternité
C'est drôle, ce slogan, je l'ai utilisé récemment quand on me demandait "trois mots pour résumer ce que j'ai retenu de mon année à l'IHEE". Et "Abus de pouvoir" (le livre qui vaut à ses lecteurs d'être les "potes" de l'auteur) consacre plusieurs pages au même slogan. Comme quoi les grands esprits se rencontrent ! Ça c'est du collectif !
Merci pour cette petite visite sur DemSF !