Françoise, auteur du Canard à l’Orange des Landes, a une immense palette de talents. Elle a en particulier réussi, comme journaliste pour Fréquence Orange, à me faire dire plein de choses bien différentes de ce que j’écris ici.

L’interview date du 6 janvier dernier, avant les cantonales, et des problèmes techniques d’enregistrement ont empêché, jusqu’à maintenant, Françoise de finaliser l’émission.

Merci à elle de m’autoriser à utiliser les enregistrements pour en publier ici quelques extraits.


Tu as été cofondateur et cogérant d’un cabinet d’évaluation des politiques publiques, c’est quelque chose qui te préoccupe ?

J’ai fait plusieurs années dans l’évaluation des politiques publiques. C’est-à-dire, des rapports sur : qu’est-ce que donne ce que fait le gouvernement, ce que font les régions ? Est-ce que ça sert, est-ce que ça marche, est-ce que c’est trop cher, est-ce que le public s'en sert, est-ce que ça fonctionne bien ?… Dans beaucoup de domaines : de la politique fiscale à la recherche… et la coopération Nord-Sud, beaucoup.

Et c’est ça qui a été un peu mon école politique, parce que je n’ai pas fait Sciences Po !

C’est en travaillant professionnellement sur les politiques, que je me suis dit : il faut s’engager ! Il faut que les citoyens se fassent entendre ! Parce que s’ils ne bougent pas, s’ils ne militent pas, il n’y a pas de raison que les politiques qui seront faites soient bonnes ! Elles seront faites dans l’intérêt, d’abord, de ceux qui les font, ou de ceux qui les payent … et le contribuable, l’habitant, ne sera pas pris en compte ! Il faut s’engager, voilà ! C’est ce que j’ai retenu de ces années d’évaluation des politiques publiques.

Je vais revenir à ton investissement, à ton parcours politique. Tu indiques que tu as été actif dans le mouvement pour l’école libre, en 82-84.

Oui, ça a été mes premières manifestations ! Il y avait 80 ou 85% des Français qui étaient d’accord, il y avait le gouvernement qui faisait l’inverse, on n’arrivait pas à comprendre pourquoi ! Alors, on descendait dans les rues.

En-dehors de ton activité professionnelle, j’ai été ravie d’apprendre que tu avais 4 filles. Ça se gère comment, un week-end à Argenteuil — tu es marié, peut-être que ton épouse travaille…

Oui, elle est enseignante dans le secondaire.

Au point de vue transport, au point de vue organisation…

C’est beaucoup de logistique, un week-end ! Les cours ceci, les courses cela, c’est beaucoup de voiture !

Tu fais de la course à pied. Ça m’a étonné que tu mettes sur le blog des temps de performance — la plupart des blogueurs mettent sur leur blog leurs exploits de stats plutôt que leur vitesse de pointe ! Pourquoi as-tu eu cette idée ?

Un blog qui ne parle que d’idées et d’opinions, ça peut être un peu sec. C’est une tentative de contrebalancer, parler de choses qui me tiennent à cœur, et la course à pied ça me tient à cœur au sens propre ! C’est bon pour mon cœur ! Comme beaucoup de gens, j’ai fait un malaise il y a quelques années — un malaise vagal, comme le Président ! — et je me suis dit : tiens, c’est le moment de refaire du sport, il faut faire travailler mon cœur.

Je ne suis pas très beau à voir courir, je cours un peu assis par terre. Aux Foulées de Saint-Germain en Laye, il y a eu une photo de photographe magnifique, où j’ai l’air d’un vrai coureur de compétition, celle-là je l’ai mise en grand sur mon blog : il a fallu toutes ces années de courses pour avoir enfin une bonne photo qui donne l’impression que je cours vite, ça m’a fait plaisir !

Je me suis demandée si le fait de mettre ton classement, c’était une sorte de dépassement de soi, un désir d’amélioration ?

Peut-être ; je ne l’aurais pas trouvé tout seul, mais tu es psychologue ! Il y a peut-être une idée de dépassement de soi, d’effort… D’ailleurs, notre parti politique n’a pas un chemin facile. C’est un chemin escarpé, d’essayer de rester dans le sens de ce qu’on veut dire, de ne pas marchander ça pour un bloc politique d’un côté ou de l’autre. Il y a un côté "bataille contre soi-même", parfois, dans la course de fond comme dans le militantisme politique ! Mais la victoire n’en est que plus belle !

Ce qui m’avait intriguée, c’est que tu parles aussi de tes amis à travers les liens que tu mets en catégorie « Personnel ». Il y a le blog d’un religieux, je crois… Est-ce que le blog te permet de parler de la religion ? Gilles Artigues, François Bayrou, n’hésitent pas à dire qu’ils sont laïcs mais catholiques pratiquants !

Tous mes amis qui ont un blog ont un lien, et il se trouve que, parmi eux, il y a un prêtre catholique et un pasteur protestant !

Quelque chose qui m’a frappé au MoDem, c’est que les questions de fond, les questions de valeurs, sont très présentes. On a parmi les militants des personnes engagées religieusement, on un blog d’une musulmane voilée qui est très intéressant, on a des blogs de catholiques pratiquants, et on a aussi des athées militants et très antireligieux, très prompts à réagir en craignant que toute religion vienne empiéter sur la liberté humaine, sur la vérité…

Un point commun de beaucoup de gens au MoDem, c’est de ne pas considérer ces questions comme quantité négligeable ; et on se retrouve facilement sur des débats comme ça.

Pour moi, les questions religieuses sont importantes, il y a 2-3 billets sur ce thème (sur le blog). Dans la religion, il peut y avoir des choses qui bouleversent les gens…

Quelque chose que je partage avec ce que dit François Bayrou, c’est que je suis complètement opposé à l’idée d’un parti religieux, ou d’un parti s’appuyant explicitement sur les valeurs religieuses. Le discours que nous tenons doit tenir tout seul, sans qu’on vienne dire « c’est à cause de Dieu, c’est à cause de la religion ». Sinon, gros gros gros… plus que feu orange, j’allais dire feu rouge, mais enfin… « panneau verglas ».

Je comprends très bien que dans l’Allemagne d’après-nazisme… une grande partie de la résistance au nazisme avait été soit portée par les réseaux catholiques ou protestants, soit communiste, je comprends très bien que des partis politiques se soient fondés sur des idéologies, soit religieuses, soit communistes. C’était considéré comme des antidotes, comme des façons de défendre la dignité humaine, contre le risque du totalitarisme. Donc, dans un pays comme l’Allemagne, ou les Etats-Unis pour d’autres raisons, les valeurs religieuses jouent un rôle explicite en politique.

En France, ce qui joue un rôle explicite en politique, c’est la Déclaration des Droits de l’Homme, de 1789, dans laquelle je me reconnais à 800%. Elle n’est pas fondée sur des valeurs religieuses, elle est fondée sur des convictions communes des Français, en tout cas, des représentants à l’Assemblée Nationale.

Je crois que notre socle en politique n’a pas à être religieux. Et je suis contre tous les gens qui voudraient qu’on revienne aux « racines chrétiennes de l’Europe », ou qui approuvent le discours du Latran de Nicolas Sarkozy, ou tout ce genre de choses. Voilà !