Ces derniers temps, pour parler de l'Europe et des élections à venir, François Bayrou associe systématiquement deux mots : idéal et changement. Européens, nous croyons à l'Europe, et nous croyons urgent qu'elle change. C'est difficile à faire entendre. Déjà en 2008-2009, François Bayrou avait tenté le même thème et ça n'avait attiré aucune attention.

Après six ans de crise, peut-être que des oreilles vont s'ouvrir ? Peut-être que des pro-Européens vont se bouger, comprendre qu'il faut construire et pas seulement défendre des acquis ? Que la politique menée en Europe dans l'économie nouvelle, l'iconomie, doit changer radicalement par rapport à celle d'il y a un demi-siècle (Marché commun), simplement parce que pour résoudre des problèmes différents, il faut des solutions différentes ?

En attendant cette prise de conscience collective, les pays européens divergent. Le Royaume-Uni comme le Portugal revendiquent le moins-disant fiscal. La Grèce demande encore et encore que les autres pays payent ses fins de mois, sans espoir de remboursement — et l'Allemagne ne peut que déplorer d'avoir accepté cet engrenage.

La courbe de l'emploi dans les différents pays illustre tristement cette divergence. Le chômage et l'emploi au noir ont explosé en Espagne ou en Grèce ; des emplois sont créés dans les pays de dumping fiscal, Autriche, Pays-Bas, Luxembourg…

(Sur ce graphique, l'axe horizontal à la valeur 0 représente le taux de chômage moyen dans les 15 anciens Etats membres, économies comparables à la nôtre. Source Eurostat, retraitements de votre serviteur. Valeurs à mai de chaque année.)

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Et ça pose des questions.

La convergence jusqu'aux années 2006 correspondait-elle à une réalité économique et sociale profonde, ou n'était-elle que le fruit d'une illusion collective de la sphère économique et financière, manipulée par quelques cyniques au pouvoir trop immense ?

La prétendue stratégie européenne de croissance solidaire par l'innovation (stratégie de Lisbonne), où a-t-elle été appliquée ? Peut-être aux Etats-Unis depuis 2008… mais chez nous ?

La nouvelle stratégie "Europe 2020" vise "une économie sociale de marché durable", générant une croissance "intelligente, durable et inclusive" grâce à une plus grande coordination entre les politiques nationales et européennes : des mots honorables mais creux ; quelle influence peuvent-ils avoir sur les États, les entreprises, les opinions publiques ?

Un signe d'espoir : il y a des pays où l'emploi s'améliore autrement que par un dumping aux dépens des voisins : Danemark, Suède, Finlande… Peut-être dessinent-ils une voie nouvelle pour l'Europe ?

Les Européennes et Européens ont une occasion, tous les cinq ans, de remettre l'Europe en route. Espérons que celle-ci, 2014, sera la bonne.