En France, nous bénéficions, grâce à la conception républicaine de la politique, d'une sorte de confusion entre le droit et la force.
Cela semble évident pour beaucoup de gens : la personne qui, de par l'élection, détient le pouvoir, a un peu le droit de tout faire. Même de ridiculiser les lieux de concertation ou de débat, d'empiéter largement sur les responsabilités des autres, de soulever l'opinion contre des ennemis imaginaires - au lieu de régler les problèmes du pays. Même de prétendre respecter le pouvoir d'un juge indépendant, là où il n'y a qu'un procureur dépendant... de lui.
En France, trancher ainsi sur tout et rien, on appelle ça "prendre ses responsabilités".
Dans un pays marqué par les idées libérales[1], on soupçonnerait aussitôt l'abus de pouvoir, l'envahissement par l'Etat de ce qui revient aux personnes et aux entreprises, la corruption, la démesure,...
Encore que ! Philippe d'Iribarne dans L'Etrangeté française rappelle (p. 273) "les diverses versions du mythe américain, celle qui magnifie le cow-boy ne comptant sur personne d'autre que lui pour défendre son droit, et celle qui magnifie le lawyer fondateur d'un État où la loi règne… John Wayne et James Stewart dans L'homme qui tua Liberty Valance."
Ça m'a fait tiquer, car je venais de lire sur obamazoom ce commentaire en franglais à la gloire de Sarah Palin :
When Napoleon came back from the orient and saw all those lawyers abuse the system and get rich, he told them to shape up or he put them in prison
Let's see how much those people and their friends have in the banks
Let's get rid of that corruption
Welcome to Sarah palin.
No more lawyers for president
Finalement, la comparaison avec des dictateurs ne consiste pas à accuser un cow-boy d'abus de pouvoir. Mais au contraire à réclamer la liberté de faire paître son bétail dans un espace public au sens de : ouvert à tous, sans règles.
Bon, alors pour vous, c'est quoi, être démocrates, en France ?
Notes
[1] Voir au passage ces deux billets de l'Hérétique sur le libéralisme et le président Sarkozy.
j'aime bien ce commentaire;
ll est très vrai qu'en France on confond droit et force.
C'est ainsi que les ELUS conscients du droit qui leur a été conféré par l'élection en use aisément (souvent abusivement) considérant sans doute qu'il s'agit d'une force qui leur aurait été conférée par l'élection.
Il en ressort un usage abusif, souvent dans l'illégalité et l'injustice.
La démocratie, du moins telle que je l'entends, ce n'est pas celà.
C'est une faculté donnée à la société de base, aux citoyens, de réfléchir, penser, s'exprimer et de transmettre aux ELUS cette REFLEXION et cette ATTENTE
Ces réflexions dont on fera la synthèse doivent permettre aux ELUS de penser en droit, juste et équitable afin de prendre des décisions dans l'intérêt du peuple, c'est à dire dans l'intérêt du PAYS.
Ils doivent agir en fonction de ces réflexions reçues et, non, en fonction de leurs intérêts personnels.(je dirais même de leur seule pensée personnelle !)
aujourd'hui qui peut prétendre que les choses se font ainsi ?
Aucune personne de bonne foi ne peut le prétendre ?
Les partis, devant les scandales préfèrent se taire,ou simplement thchatcher plutot que d'agir.
Ce que nous vivons aujourd'hui, n'est que le reflet de la faiblesse, de nos dirigeants, de nos parlementaires et élus dont le plus grand des soucis c'est de se préoccuper de SON lendemain plutot que de respecter le peuple qui l'a élu et, ses attentes.
Ce ne sont pas des DEMOCRATES.
Ils ont TUE LA FRANCE.
excellente question et billet terriblement sympathique
être démocrate = donner de la force aux exigences démocratiques d'une société , une façon de rendre ces exigences nécessaires sans qu'il soit utile de passer par un juge pour en obtenir le bénéfice , un destin collectif conceptualisé dans le "peuple" pour éviter à l'individu la génuflexion, une résistance à l'absolutisme d'une personne , d'un groupe ou d'un système, une vision de l'intérêt général régulateur et non oppresseur, la volonté d'agir pour le bien commun et enfin la croyance aux miracles .
Merci, ça fait déjà deux
Deux visions dans lesquelles la démocratie est un jeu à deux acteurs : le pouvoir (une personne, un groupe...) et le peuple, la société de base, les citoyens.
Si je comprends bien gilco, la démocratie c'est quand le pouvoir est à l'écoute du peuple et agit dans l'intérêt du peuple, non dans le sien propre.
Et si je comprends bien monpostdemocrate, la démocratie c'est la résistance du peuple au pouvoir du pouvoir.
Excusez si je vous taquine, mais une telle démocratie me semble être "en Pologne, c'est-à-dire nulle part" ?
Peut-on imaginer une démocratie dans laquelle "prendre ses responsabilités" ne serait pas l'apanage d'un seul ?
Peut-on imaginer une démocratie dans laquelle "prendre ses responsabilités" ne serait pas l'apanage d'un seul ?
Défaut de la démocratie représentative, la tendance naturelle de la classe dirigeante est de dominer dans son pré carré, une façon de conserver le pouvoir et de l'exercer sans véritable partage. Si ce n'était pas le cas il y aurait belle lurette qu'on enseignerait ce qu'est la démocratie dans nos écoles ou ailleurs. Démocratie ? la mise en place, du mieux possible, de processus de décision collective. On arrêterait alors de dénigrer le débat décrit comme une source d'inefficacité et de retard : insupportable , mon cher Fillon, dans le monde de l'immédiateté qui impose la tyrannie de l'urgence.
Ecoutez le président de la République lors de son discours à Grenoble sur le thème de l'insécurité : une phrase introductive qui n'a l'air de rien, un mot d'excuses qui en dit long sur l'esprit démocratique qui l'anime .
"Je vous demande d'excuser mon grand retard qui est dû au fait qu'il y a un grand appétit de paroles, ce que je comprends parfaitement, et donc quand on discute c'est normal, on accumule beaucoup de retard. "
"Appétit de paroles" ... "on accumule beaucoup de retard" = je vous ai compris mais c'est moi qui décide, suivi d'un, vous m'avez élu je fais ce que je veux.
(remis en forme par FrédéricLN - au passage, votre définition de la démocratie, centrée sur le mécanisme collectif dans la prise de décision, rejoint celle d'Amartya Sen, Cf. le billet que j'avais titré "le débat construit des sociétés humaines".)
la construction des sociétés humaines est-elle débattue démocratiquement ? et à toutes fins , pourquoi aimerais-je plus la "démocratie" que "pas la démocratie". Eh bien je vais vous le dire.
Face aux diktats économiques il n'y a que les forces démocratiques qui font le poids . S'il convient de se libérer du système de développement économique qui s'impose à nous, s'il convient d'engager un processus de désaliénation vis à vis de l'emprise qu'exerce le système capitaliste dominant ( téléguidé par le système financier mondialisé ) sur nos modes de vie au quotidien, il est clair que seules les ressources d'une saine démocratie seraient susceptibles d'accompagner un tel passage ou changement qualitatif.
Dans les milieux autorisés (ceux du marché) les spécialistes parlent beaucoup de saine concurrence entre les acteurs économiques. On peut bien , entre nous, s'autoriser à poser une question : une saine démocratie c'est quoi? à votre avis ?
@monpostdemocrate : oui, je crois cet argument absolument essentiel. C'est "plus de démocratie pour plus d'économie, plus de durabilité, plus d'emplois". Très bien dit par Keny Arkana (avec des éléments de réponse à votre question finale) : http://demsf.free.fr/C576281391/E20...
Et les deux groupes au pouvoir, UMP/PS, s'arrangent au contraire d'un partage du pouvoir dans lequel ils se retrouvent en position soit de dupes, soit de valets, soit au mieux de faire-valoir, du grand capital mondialisé.
"La démocratie est l'organisation sociale qui tend à poter au maximum la conscience et la responsabilité civique de chacun" - Marc Sangnier, in L'Esprit démocratique. Marc Sangnier était d'ailleurs partisan de l'économie sociale, et critique par rapport au salariat et à l'entreprise privée traditionnelle.
On rejoint le sujet de l'entrepreneuriat et des PME dans le dernier billet de L'Hérétique : http://heresie.hautetfort.com/archi...