Rebond sur mon précédent billet "La sécurité routière, ça se construit AVEC les automobilistes". Grâce au papier, aussi riche que long, de verel : "Morts sur la route et conduite du changement".

"Conduite du changement", c'est exactement de cela qu'il s'agit.

Mais en quel sens ?

Le mot "conduite du changement" a signifié au départ quelque chose comme "obtenir le changement, susciter l'appropriation du changement" parce que sans cela, les décisions du sommet des bureaucraties étaient vaines, inappliquées sur le terrain.

Depuis dix ou quinze ans, "conduite du changement" veut dire[1] : tordre le bras aux salariés pour qu'ils se rendent bien compte que leur usine a été fermée, que leurs collègues ont été licenciés, que leur logiciel a été changé, et qu'ils n'ont pas d'autre choix que de continuer sur les nouvelles bases qu'on leur a imposées.

Un peu la situation des centristes de droite ;-) auxquels on reproche de pinailler sur la méthode alors qu'ils sont d'accord avec la droite sur le fond. Dans mon langage[2] : ils acceptent d'être roulés dans la farine et qu'on les fasse frire, à condition qu'on baisse le gaz...

Le cas de la sécurité routière, duquel des deux modèles ressort-il ?

La sécurité routière est-elle produite par de bonnes décisions gouvernementales, qu'il suffit d'imposer contre les résistances d'opposants ?

Ou la sécurité routière est-elle produite par le comportement des automobilistes eux-mêmes, que les décisions gouvernementales ne peuvent que susciter, dans le meilleur des cas ?

Qui est au volant de mon Espace ? François Fillon, ou moi ? Qui est au volant de la moto qui me dépasse ? François Fillon ?

Dans le cas de la sécurité routière, obtenir un consensus n'est pas un moyen parmi d'autres, dont on pourrait se dispenser, c'est au contraire l'objectif à poursuivre par la politique de sécurité ; car comme l'écrit encore verel, c'est de comportement "collectif" qu'il s'agit : on ne peut pas, sur la route, être en sécurité tout seul.

Avis sympathique et original de démocrate rêvant d'un autre monde ?

Non : constat fondé sur les statistiques des morts sur 40 ans, dans le monde réel[3]. Constat qu'il serait utile de prendre au sérieux — de façon à réduire le nombre d'accidents mortels.

Notes

[1] Oui, une référence wikipedia ne renvoie pas un contenu très stable, désolé.

[2] Pompidolien.

[3] Je viens de voir la même courbe sur la revue de presse de Télématin, qui la reprenait de France Soir ! Bon signe.