(suite du billet où il est démontré que "les inégalités augmentent, et les hauts revenus s’envolent")

Si les inégalités augmentent, c’est entre autres, parce que les pouvoirs publics les ont fait croître, et sciemment. La porte a été si grande ouverte par le paquet fiscal qu’il n’y a plus ici besoin de démonstration ; même si, en 2007, dire cela comme l’a fait François Bayrou était prêcher dans le désert !

Depuis la campagne Chirac de 2002 (vous savez ! la « baisse d’un tiers des impôts ») puis pendant la campagne présidentielle 2007, nombre d’orateurs de droite vantaient les défiscalisations en faveur des plus riches : les riches, paraissait-il, consomment, donc l’argent qu’on leur donne relance l’économie. Bien sûr, c’est l’inverse qui est vrai : les pauvres dépensent l’argent qu’ils ont et relancent effectivement l’économie ; les riches le placent et font ainsi monter les cours de l’immobilier et gonfler la bulle financière.

Tout récemment encore, on vantait, de la gauche à la droite, les stock-options (l’accumulation par le top management de revenus défiscalisés) comme une façon de faire travailler les managers dans l’intérêt de l’entreprise, donc de l’ensemble des salariés et de la collectivité. Bien sûr, elles encourageaient plutôt, dans les grandes entreprises, les délits d’initié, le pillage des actifs et la désinformation des marchés.

Était-ce inadvertance, ou stratégie ? François Bayrou livre là-dessus une seule citation (page 115), mais elle vaut son pesant de cacahuètes. C’est le rapport de 1994 au Premier Ministre Édouard Balladur, où l’auteur, Alain Minc, évoque le « niveau d’inégalités nécessaires pour assurer le dynamisme de l’économie ». Certes, les élucubrations d’Alain Minc n’engagent heureusement que lui, pas nos décideurs politiques et économiques ; mais la thèse était ainsi clairement posée, et de stock-options en défiscalisations, les exemples abondent de son application par les décideurs.

Le dernier point du raisonnement semble couler de source : une autre stratégie est possible. Tenir l’investissement productif à l’écart des tourbillons géants de la finance spéculative. Maintenir dans la sphère publique les services publics qu’une privatisation ne pourrait que renchérir. Obliger les gros revenus et grandes fortunes à contribuer équitablement aux dépenses publiques, en barrant leur fuite vers les paradis fiscaux.

Mais cette autre stratégie serait-elle meilleure ? Je doute que l’opinion en soit solidement convaincue. Ça mérite un troisième (et dernier !) billet.